Test : Company of Heroes 3 (Windows)
A l'opposé des jeux quasi-annuels comme Fifa, Call of Duty ou même Football Manager se trouve une série: Company of Heroes. Sorti initialement sur pc en 2006, le jeu sera acclamé par les joueurs et la critique. Sept ans plus tard, Relic Entertainment, racheté entre temps par Sega, remettra le couvert. Le jeu sera une nouvelle réussite même si la représentation des soviétiques fera jaser et amènera le jeu a être banni en Russie. Il faudra attendre dix ans pour enfin voir le troisième opus, une autre réussite critique ?
Embarquement
Il y a des jeux et séries que l'on ne connaît que de réputation, Company of Heroes en est une pour moi. La seconde guerre mondiale ne m'a jamais intéressé et mon seul court contact avec la série a été lorsque le second opus a été offert. Mais après les tests de Age of Empires IV et Total War: Warhammer III, je dois avouer que la curiosité était présente. Le jeu nous accueille sur un écran somme toute classique, nous proposant de commencer ou reprendre une campagne, lancer une partie rapide, une partie en ligne et, enfin, les inévitables options.
Commençons rapidement par les options, on y trouve tous ce que l'on peut attendre d'un jeu pensé pour le PC, et faire tourner le jeu convenablement en full HD devrait être possible si vous avez une bonne configuration de moins de 6 ans. Malheureusement avant la sortie officielle il n'était pas possible de reconfigurer les touches du clavier. La majorité des actions peuvent être faites à la souris et ceux qui voudront jouer de manière compétitive utiliseront sans doute des macros mais cela était tout de même décevant. A confirmer quand le jeu sera sorti.
On s'arme pour l'offensive
Company of Heroes 3 nous propose deux campagnes : le débarquement en Italie qui nous demandera de libérer la péninsule et remonter jusqu'à Rome et la campagne en Afrique du Nord. Si la seconde nous propose un classique enchaînement de missions entrecoupés de scénario, la première m'a énormément surpris.
Ce n'est pas faute d'avoir lu la preview de Shenron, mais je n'avais juste pas réalisé ce qui m'attendait après avoir accompli une première mission tutoriel pour poser le pied dans la botte. Je me retrouve sur une carte qui, à bien des égards me rappelle Total War. Déplacer une armée sur la carte ? Check. Pouvoir recruter des armées supplémentaires ? Check. Avoir à disposition plusieurs ressources pour agir sur le terrain ? Check ! Est-ce que je me suis trompé de jeu ? Est-ce que je joue à Total War : World War II ?
La réponse est non ; si la "carte de campagne dynamique" a un air de Total War, nos possibilités de développement sont bien moindres et c'est tout à fait logique : nous contrôlons une armée et devons libérer un pays, ici on ne développe pas de fermes ou de marchés pour avoir plus de ressources. Attention, ce n'est pas linéaire ou basique pour autant car chaque ville capturée vous octroiera un bonus. Les ports augmentent votre limite de population et permettent de recruter des armées ou des bateaux, les aérodromes vous permettent de recruter des avions et de les utiliser pour bombarder ou ravitailler vos hommes, enfin les dépôts de munitions et de carburant vous accorderont tout simplement plus de ces ressources. Le carburant et les munitions serviront lorsque vous voudrez utiliser vos avions et bateaux.
Vos maigres ressources initiales vous obligeront à faire des choix et orienter vos conquêtes en fonction de votre besoin immédiat. Là encore, ne vous attendez pas à une totale liberté, le contexte bien précis de la campagne ne le permet pas et de toute façon, toutes les routes mènent à Rome. Vous aurez toujours un objectif principal donné et occasionnellement des missions secondaires, certaines n'étant réalisables que pendant un certain temps. Vos deux bras droits (parce que vous êtes doué) vous suggéreront différents plans : l'Américain préférant foncer et longer la côte jusqu'à Rome, le Britannique préférera consolider le ravitaillement en libérant progressivement l'Italie. Favoriser l'un ou l'autre augmentera sa loyauté envers vous et vous accordera quelques bonus. A noter qu'il y a aussi la cheffe des partisans de Rome, mais elle intervient moins souvent et est plutôt une raison de ne pas abuser des bombardements.
Etant plutôt adepte du nettoyage de carte, je disperse mes armées pour conquérir méthodiquement chaque ville en balayant la botte dans toute sa largeur. La prise d'une ville peut se faire de trois manières distinctes : la première, s'il n'y a pas de garnisons, la ville perdra un "point de vie" en avançant une unité dessus comme on le ferait dans un Civilisation. Ces points de vie sont déterminés par son niveau de fortification, et si elle n'en a plus ou n'en a pas, la ville se rend à vous sans combattre. Baisser son niveau de fortification est aussi possible en la bombardant avec vos cuirassés ou vos avions.
La deuxième et troisième option sont l'escarmouche et la mission ; celles-ci ne vous permettent pas de résolution automatique et ce sera donc à vous de mener à bien la prise de la ville. La différence se fera principalement sur la durée de la bataille : une escarmouche vous demandera de réaliser des objectifs simples plutôt basés sur la vitesse et il ne faudra pas plus de dix minutes pour y parvenir. La mission propose des objectifs plus complexes et il n'est pas rare de passer plus de 45 minutes à batailler sur chaque point de capture de la carte pour la terminer, surtout si vous avez envoyé une armée inadaptée à la situation.
Toujours à la manière d'un Total War, vos armées gagneront de l'expérience au fil des batailles. Cela vous permettra de débloquer des compétences à utiliser sur la carte de campagne ou en bataille ainsi que de nouvelles unités. Malheureusement, l'expérience et les éléments constituant vos unités sont réinitialisée à chaque bataille.
Unité de reconnaissance déployée
Peu importe la bataille, le début sera peu ou prou le même: vous commencez dans un coin de la carte avec quelques unités d'infanterie, vos ressources montent lentement et vous songez à comment améliorer votre situation. Les zones capturées sont le nerf de la guerre car chacune vous permettra d'augmenter la production d'une ressource, et comme pour la carte de campagne vous orienterez vos premières prises en fonction de vos besoins: vous voulez utiliser les compétences spéciales de vos hommes ? Il vous faudra plus de munitions. Vous voulez recruter des véhicules blindés ? Il vous faudra plus de carburant. Je devrais citer la dernière ressource qui est la gestion d'homme mais, honnêtement, il m'a semblé quasiment impossible d'en manquer.
Je déplace mes hommes vers un premier drapeau pour plus de carburant, avançant prudemment en les mettant à couvert autant que possible : buissons, murs, véhicules abandonnés, tout peu servir à rester discret. La qualité de la couverture est déterminée par sa couleur: jaune est peu couvert, vert est couvert, blanc vous êtes une cible facile.
Des unités ennemies ? Je sélectionne toutes mes unités, je clique droit sur mon ennemi et ça devrait aller. Ha ! On s'est cru sur Age of Empires ? En faisant cela, la moitié de vos unités seront à découvert, c'est de la guerre moderne ici, pas du bourrinage. Pendant que mon infanterie reste à couvert et échange les balles avec mes ennemis, j'utilise la pause tactique pour planifier le déplacement d'une autre unité et contourner les Allemands. Ainsi, même si une autre unité ennemie est sur le chemin, mon parcours est truffé de zones de couverture pour ne pas être une proie facile. Les Allemands pris au piège, eux, tentent de s'échapper mais n'en auront pas l'occasion.
Avec mon nouveau carburant, je peux faire appel à un char léger, pratique pour offrir une couverture mobile et faire des trous dans les défenses ennemies. J'avance avec confiance et rencontre quelques unités ennemies, même pas peur ! J'avance mon char vers eux, mon infanterie reste un peu en arrière pour ne pas être une cible, le combat s'engage et rapidement je réalise que leur infanterie est équipée de lance-roquettes, c'est mauvais. Mon char étant mieux blindé à l'avant qu'à l'arrière, je décide de lui faire utiliser sa marche arrière pour limiter les dégâts et ainsi, mais ? Mais qu'est-ce qu'il fait ? Voilà que mon char s'engage dans une manœuvre digne d'un jeune qui fait son premier créneau, les Allemands en profitent et achèvent mon engin.
Et oui, le pathfinding. Si les unités à pied sont globalement épargnées, voir un véhicule faire n'importe quoi ne sera malheureusement pas rare et vous frustrera d'autant plus que son orientation est essentielle pour le faire durer. Même si c'est agaçant, c'est rarement déterminant et seules quelques escarmouches ou missions sans recrutement possible pourraient poser problème. Un peu plus de prudence dans ses déplacements devraient vous éviter une bonne partie des pertes, mais pour un jeu qui sort dix ans après son prédécesseur et avec un report de trois mois dans les pattes, c'est moche. Bon, j'aurais peut-être dû investir dans un char lourd alors...on en recrute un et on y retourne ?
Les problèmes de promesses
En termes de durée de vie, le jeu offre un contenu conséquent. Si les objectifs des batailles sont dans le fond toujours à peu près les mêmes (prendre des points stratégiques, détruire les défenses allemandes, résister à leur offensive, etc.), les cartes de missions sont suffisamment variées pour être toujours dans la découverte du terrain. Les cartes d'escarmouches le sont moins mais la courte durée de ces batailles nous évite d'avoir un sentiment de déjà vu trop présent. La carte de campagne permet d'y aller à son rythme et si on souhaite privilégier les escarmouches, rien n'empêche de prendre trois villes comme ça avant de se motiver à faire une mission.
La pause tactique offre énormément de possibilités et il est difficile de le retranscrire correctement à l'écrit sans doubler ou tripler la longueur du test. La limite d'une dizaine d'ordres par unité ne sera jamais un problème : si vous contrôlez le terrain vous irez au plus court, si vous êtes près ou vous préparez à entrer en conflit, vous devrez bien assez vite changer vos ordres pour vous adapter.
Pourtant il y a plein de petits trucs qui ne vont pas, le pathfinding des véhicules évidemment, mais aussi la passivité absolue de vos soldats : vous leur avez ordonné de tirer sur une unité ? Ils ne bougeront pas de leur place même si une grenade a été jetée juste à côté. La pause tactique n'est pas juste un ajout sympa mais est essentielle pour pouvoir surveiller vos unités et réagir à temps. En multi cela ne posera pas de problèmes puisqu'aucun joueur n'y aura accès. Je n'ai malheureusement pas pu tester l'aspect multijoueurs car les sessions prévues tombaient sur mes heures de travail. Il y a aussi l'impossibilité de "supprimer" une unité : certes le jeu nous encourage à prendre soin de nos soldats, mais quand une unité se retrouve coincée à essayer de rentrer dans un bâtiment en boucle sans possibilité de libérer la place…
Si on retourne sur la carte de campagne, il est parfois difficile de visualiser nos troupes. Résultat, nos largages de ravitaillement finissent proche d'eux mais ils ne les prennent pas. Pourtant si vous bombardez une zone, le jeu mettra en surbrillance les ennemis touchés, alors pourquoi ne pas avoir fait la même pour le ravitaillement ?
Lors des vidéos de présentation, l'importance du relief avait été mis en avant et il est vrai que cela a un impact lors des échanges de tirs. Seulement, en campagne vous êtes systématiquement celui qui attaque, et donc celui qui n'a pas l'avantage du terrain, cela sera bien sûr différent en multi ou dans une partie rapide. On peut aussi ajouter que si le décor est effectivement destructible, l'intérêt est plutôt limité, surtout si vous devez faire appel à vos tanks qui mettront une plombe à comprendre ce qu'ils doivent faire. Et puis pourquoi détruire un environnement quand certaines unités peuvent lancer des grenades à travers les bâtiments ? Au final, le sentiment qui prédomine est que le jeu aurait dû être encore repoussé.
Enfin point Steam proton/linux, le jeu se lance depuis le premier jour mais tourne comme une patate sur mon PC pourtant costaud. A voir dans quelques mois.
Est-ce que le jeu est le digne troisième opus de la série ? C'est une réponse à laquelle je ne saurais répondre, mais c'est un très bon jeu qui offre une campagne à la Total War simplifiée, des batailles en temps réel à mi-chemin entre la tactique d'un Total War et le micro-management d'un Age of Empires, le tout rendu accessible avec la pause tactique. Le jeu ne souffre pas de gros problèmes mais les nombreux petits soucis de finition sont visibles et agaçants, sans eux le jeu aurait eu un 8 sans souci et il les méritera sans problème quand cela aura été réglé. En l'état, le jeu reste très agréable et on prend plaisir à mettre nos ennemis en déroute.
Verdict
Points forts
- La campagne à la Total War
- La pause tactique
- La satisfaction d'une offensive menée avec brio
- Le chaînon manquant entre AoE4 et Total War
Points faibles
- Le pathfinding souvent aux fraises
- Des interactions sur la carte de campagne pas toujours claires
- Le jeu très dur sans pause tactique
- Pas de remapping des touches
Archives commentaires