Sega Saturn, le rêve 32-bit - Partie 1.
Nous sommes en 1990, la Mega Drive est sortie depuis deux ans déjà , et son succès à l'international est le plus important connu par SEGA depuis son incursion sur le marché du hardware domestique en 1983. Toutefois, la console de la firme de Haneda peine à convaincre sur le sol nippon.
Consciente de la permanente évolution des technologies, l'entreprise s'apprête à lancer sur le marché des consoles le premier périphérique destiné à sa 16-bit, le Mega-CD. Si ce dernier à un double objectif avoué, à savoir permettre à la Mega Drive des fantaisies graphiques pouvant rivaliser avec celles de sa rivale la plus farouche, la Super Famicom, et concurrencer directement le Super-CD Rom de NEC, un troisième but n'est pas directement dévoilé : tester la viabilité du support CD sur le marché des consoles dans l'optique de remplacer à terme les cartouches, traditionnels médias de jeux.
Parallèlement, l'entreprise conçoit et sort en salles d'arcade son nouveau bijou, à savoir le System-32, successeur du System-24, qui recevra des perles telles que Rad Mobile, Golden-Axe : The Revenge of Death Adder ou OutRunners. Toutefois, le System-32 n'est qu'une transition qui doit mener à la nouvelle évolution des cartes d'arcade made in SEGA et vers le Model 1.
En ce début de fin de siècle, SEGA songe donc tout logiquement au futur successeur de la Mega Drive/Genesis et ambitionne tout simplement de créer la console la plus performante de l'histoire en matière de 2D.
Le culte de la 2D
En 1992, Hideki Sato et son équipe commencent à travailler sur la nouvelle console. Les premières spécifications apparaissent et c'est sans surprise que l'on constate qu'elle est articulée autour du NEC V60 (3,5 MIPS) cadencé à 16Mhz du System-32. Son nom de code: Le projet Giga Drive, comme un écho à sa devancière.
L'expérience du Mega-CD démontre à SEGA qu'un périphérique CD-ROM est bien trop coûteux, (ce qui causa en grande partie son échec commercial) mais que le support est celui de l'avenir, il est donc temps d'abandonner le port cartouche et de concevoir une machine pourvue dès l'origine d'un lecteur CD.
En mars de cette même année, le magazine MegaTech révèle le nom du projet, et dévoile sa parenté avec le System-32, qu'il serait compatible avec les jeux Mega Drive et Mega-CD, et que JVC assisterait SEGA dans le développement de la machine.
Au mois d'avril, Tom Kalinske, CEO de SEGA Of America, confirme le nom de code de la machine et son développement, mais pas le reste des informations.
A cette époque, SEGA mène une double guerre, présent à la fois sur la marché de l'arcade et sur celui des consoles, et si Nintendo est le rival principal de SEGA sur ce dernier secteur, c'est Namco qui est son concurrent le plus sérieux dans les salles obscures. En 1988, ce dernier sortira le premier système capable de générer des polygones, le System 21, surnommé "Polygonizer", et contrairement à la croyance populaire, c'est bien sur ce support que sortira le premier jeu de F1 en 3D, à savoir Winning Run en 1989.
D'ailleurs, Namco faillit sortir une console de jeu dans les années 1990 : pour la petite histoire, en 1989, désirant rejoindre SEGA et Nintendo sur le marché des consoles de salon, ils travaillaient sur une machine 16 bit qu'ils présentaient comme ayant un microprocesseur aussi rapide que celui de la Mega Drive et surpassant la palette de couleur et les capacités sonores de la future Super Famicom.
NEC et Hudson Soft venaient de commercialiser la PC Engine et travaillaient déjà sur son successeur, et lorsque Namco sollicita NEC pour proposer un partenariat, ce dernier, séduit par l'aura mondiale que générait à l'époque la mascotte de Namco, Pac-Man, songea tout naturellement aux futures retombées pour la PC Engine 2.
Mais Hudson Soft craignant de perdre le contrôle de la console au profit de ce nouveau partenaire, décida de faire commercialiser la version du hardware conçue sans le matériel de Namco et qui devint la SuperGraphx. Namco, poussé à travailler seul sur son projet désormais appelé SuperSystem, réalisa sans doute qu'il était trop risqué de se jeter seul dans la bataille, notamment à cause du coût de production de la machine, et décida purement et simplement d'annuler son projet.
Pour concurrencer le System 21, SEGA conçoit avec l'aide de General Electric Aerospace sa nouvelle carte, le Model 1, basé sur le même microprocesseur que le System-32 mais bardé de composants spécialisés, capables de générer des graphismes en 3D polygonale de manière bien plus simple grâce à son architecture basée sur des coprocesseurs très rapides, des DSP de Fujitsu épaulant le très lent V60, et disposant d'une palette de couleurs de 16,7 millions de teintes en 24 bits permettant d'en afficher 32 768 simultanément et 180 000 polygones par seconde. Toutefois, le coût exorbitant de la machine limitera le nombre de jeux et sa production.
Virtua Racing sera le premier jeu de course parfaitement jouable en 3D, il sera bientôt rejoint par Virtua Fighter.
Pourtant, SEGA est certain que l'avenir des consoles de salon est dans la 2D et que la 3D de haute volée doit rester la vitrine technologique des bornes d'arcades.
Si la première 32-bit de l'histoire est la confidentielle FM Towns Marty de Fujitsu sortie en 1991, c'est bien l'année 1993 qui marque le réveil de la concurrence et l'émergence de nombreux projets. Atari travaille depuis deux ans sur deux consoles en parallèle : une 16 - 32-bit ,la Panther, et une 64-bit, la Jaguar, et officialise l'abandon de la première et la sortie de la suivante. Trip Hawkins, qui a quitté Electonic Arts pour fonder sa propre entreprise, dévoile la sortie du standard 3DO, Commodore commercialise l'Amiga CD 32, NEC annonce la PC-FX, etc…
Si certains projets apparaissent aux yeux de l'entreprise comme anecdotiques, la 3DO fait sur le papier clairement figure pour Nakayama de concurrente directe à la Giga Drive ; techniquement, les deux consoles se ressemblent, un microprocesseur 32-bit cadencé à une vitesse équivalente, et un lecteur CD-Rom de base, la console de SEGA se doit donc d'être plus performante que celle de Hawkins.
Du crépuscule de la Giga Drive à l'aurore du projet Saturn
Cependant, Tom Kalinske a une vision de l'avenir du marché qui diffère de celle de la direction japonaise ; en effet, les sorties de Virtua Racing et surtout Virtua Fighter quelques mois auparavant lui on fait réaliser que l'industrie du jeu vidéo était sans doute à un tournant de son histoire, et qu'elle rentrait inévitablement dans l'air de la 3D.
Nous sommes au mois de février et le projet Giga Drive se transforme en projet Aurora. La console oscille alors entre un System-32 et un Model 1, et est dès le début pensée comme une borne d'arcade, c'est à dire un processeur central épaulé de plusieurs coprocesseurs spécialisés dans chaque type de traitement, au lieu de concentrer la puissance sur un seul composant. Ainsi autour du NEC V6O gravitent le 68000 de la Mega Drive cadencé à 11,3Mhz cette fois destiné au son, un nouveau VDP, et elle dispose d'un lecteur de CD-ROM JVC double-vitesse. De plus, contrairement à la croyance populaire, la machine est bien capable d'afficher de la 3D, mais de manière rudimentaire avec de modestes possibilités en 3D polygonale, son domaine de prédilection restant bel et bien la 2D, comme le souhaitent ses concepteurs.
Convaincu du manque de cohérence du projet avec son temps, Tom Kalinske profite de ses connections dans le milieu pour rentrer en contact avec Sony et avec Olaf Olafsson qui venait de mettre un terme à sa collaboration avec Nintendo, afin de lui proposer un partenariat entre les deux entreprises ; l'idée d'un SEGA-Sony Hardware System est lancée.
Le projet séduit la direction de Sony, Kalinske se rend donc enthousiaste au Japon afin de rencontrer Hayao Nakayama... Qui déteste l'idée même d'un partenariat et rejette tout accord.
Kalinske tente alors d'expliquer que Sony possède la technologie capable de créer des jeux en 3D texturés, mais le président de SEGA ne veut rien entendre et lui rétorque que réaliser un hardware 3D d'un niveau comparable au Model 1 serait bien trop coûteux, et qu'il ne croit pas que Sony en soit capable... Dépité, Kalinske rentre aux États-Unis la mort dans l'âme.
Sony développe donc tout seul de son côté sa machine qui, pour la petite histoire et grâce à Kalinske, trouve son existence dans la sortie de Virtua Fighter qui finit de convaincre Ken Kuturagi, ingénieur du hardware Sony, de la possibilité de créer des jeux vidéo 3D viables pour console de salon. Namco, le grand rival de SEGA en arcade, est dès le début de la conception de la console contacté par Sony pour s'assurer de son soutien.
SEGA décide alors de lancer son System Solar Poject : derrière le nom de plusieurs planètes du système solaire se cache un nouveau projet de hardware.
Un schéma similaire est apposé aux équipes de développement internes : La Team Aquila (Victory Goal / Sega Worldwide Soccer), la Team Andromeda (Série Panzer Dragoon), la VEGA Team (J-League Pro Soccer Club), la Team Ara (Clockwork Knight). Toutefois, la Sonic Team ne change pas de nom tout comme STI (Sega Technical Institute), SegaSoft et G9 Team.
D'autres studios appartenant à SEGA conservent un nom " classique " : Sonic! Software Planning, SIMS, CRI et NEXTECH.
En substance, le System Solar Project se compose ainsi :
- Sega Mercury: La Game Gear
- Sega Venus: La Nomad
- Sega Jupiter: Une console 32-bit au format cartouche
- Sega Saturn: Une console 32-bit au format CD
- Sega Mars: Le 32X
- Sega Neptune: Un combo Mega Drive/32X
- Sega Pluto: Un combo regroupant Saturn et possibilités de jeu en ligne
- Sega Titan: Le STV, carte arcade basée sur la technologie Saturn
- Sega Janus: Sega Picture Magic, une tablette graphique basée sur la technologie Mars/32X
A cette époque, certains magazines assurent détenir des informations exclusives : Mean Machines et Consoles + annoncent fièrement que SEGA aurait upgradé le V6O qui tournerait maintenant à 27 Mhz, et que la console serait capable d'afficher 16 000 polygones par secondes et disposerait d'un lecteur de CD-Rom quadruple vitesse pour un prix compris entre 350 et 500 dollars. Mean Machines présente même un concept de design issu de ses informations.
En novembre, Sony annonce son arrivée sur le marché des consoles avec le projet PS-X, ce qui n'inquiète pas le moins du monde SEGA qui considère l'inexpérience de Sony dans le hardware console comme un handicap, comme semble le démontrer l'aventure 3DO.
Le développement chez SEGA se poursuit, différents prototypes de la console sont présentés pour tester son design, tous sans port cartouche.
Hayao Nakayama décide, en parallèle de sa 32-bit à support CD-Rom, de créer également une console cartouche, sans doute pour contrer la Jaguar. Le projet Aurora devient Saturn et la console à cartouche Jupiter, le président de SEGA exigeant une sortie de cette dernière pour Noël 1994.
Au tout début de son développement, Jupiter était sur le papier une toute nouvelle Mega Drive, articulée autour du 68000 de la 16-bit auquel était adjoint un Hitachi SH1 et possédant une palette de couleur étendue entre 128 et 512 couleurs affichables simultanément, ainsi qu'un tout nouveau VDP, ce qui aurait permis une parfaite compatibilité avec les jeux 16-bit tout en permettant d'accéder à de nouveaux jeux spécifiquement développés pour le SH1. Mais les spécifications évoluèrent très vite vers deux nouveaux projets supplémentaires (voir plus bas).
Nous sommes au mois de novembre 1993, l'élaboration des deux consoles va bon train lorsque Sony révèle les spécificités de sa machine qui chez SEGA firent l'effet d'une bombe.
Après avoir obtenu une copie des spécifications technique de la console de Sony, Hayao Nakayama réalise que Tom Kalinske avait sans doute raison: La PS-X est techniquement bien supérieure à la Saturn. Mieux, elle est même deux fois plus puissante que le Model 1. Le président de SEGA demande à sa division Recherche et Développement de booster leur console ; Hideki Sato et la Away Team doivent mettre les bouchées doubles, la Saturn étant annoncée pour une sortie au mois de novembre 1994.
SEGA Of America propose alors de remplacer le Nec V60 par le MC 68020, premier vrai microprocesseur 32-bit de Motorola, dont la fréquence pouvait aller jusqu'à 33 Mhz et développer une puissance de 10 MIPS : plus que le V60 et ses 3,5 MIPS. De plus ressemblant, beaucoup au 68000 de la Mega Drive, son utilisation aurait été facilitée. Néanmoins, il n'était pas suffisamment puissant pour lutter contre le R3000A (30 MIPS) de la future PlayStation.
SEGA Japon, qui entretenait de bons rapports avec Hitachi, les contacta afin de savoir s'ils ne possédaient pas un microprocesseur pouvant faire l'affaire, et hasard ou non, l'entreprise venait de concevoir le successeur du SH1, à savoir le SH2 (25 MIPS).
Mais consciente qu'un seul SH2 ne serait toujours pas suffisant pour lutter contre la PlayStation, la Away Team décida de créer une architecture à double micro-processeur avec deux SH2, doublant également le nombre de VDP en ajoutant le VDP 2. Le temps étant compté, il fût décidé d'ajouter à la console un port cartouche destiné notamment à augmenter la RAM, la Saturn approchant ainsi son résultat final.
Tom Kalinske, peu séduit par la solution du double microprocesseur, contacta alors Silicon Graphics afin de savoir si une puce unique et suffisamment puissante ne serait pas disponible. L'entreprise venait justement de créer un chipset destiné à équiper des consoles de jeu. Kalinske, encore une fois emballé, appela sa direction qui décida de faire le voyage pour examiner la puce.
Le CEO américain était certain de tenir un meilleur composant en termes de graphisme, de vitesse ou de son, mais les japonais le trouvèrent juste trop gros. Ce simple argument mit fin à la négociation, et Kalinske, à nouveau déçu, glissa toutefois à Silicon Graphics le nom de Nintendo et la puce finira par équiper la future N64.
Au Japon, la Away Team, trop occupée à finaliser la Saturn, décide avec l'accord de Nakayama de proposer le projet Jupiter aux équipes américaines afin de ne pas se disperser.
Le 8 juin 1994, une nuit avant l'ouverture du CES de Las Vegas, une réunion se tient dans une chambre d'hôtel ; Hayao Nakayama révéla donc l'existence de cette deuxième console aux américains. Etaient notamment présents Tom Kalinske, Joe Miller, ainsi qu'Hideki Sato et son équipe qui présentèrent non pas un mais trois projets de hardwares pour équiper la future machine :
- Le premier était de conserver l'architecture 68000 + SH1 initiale et la palette de couleur étendue ainsi qu'un nouveau VDP.
- Le second proposait une machine équipée de deux 68000 comme sur certaines bornes d'arcade de la firme (System-24), là encore avec un nouveau VDP.
- Enfin le troisième projet se voulait être une transposition de la technologie Saturn et ses deux SH2.
C'est cette dernière option qui fut choisie et Jupiter devint pour quelques temps le pendant cartouche de la Saturn.
Joe Miller, Directeur de la division Recherche et Développement de SEGA America, trouva plus judicieux de créer un add-on pour la Mega Drive plutôt qu'une nouvelle machine, peut-être influencé par la mode des processeurs embarqués dans les cartouches SNES ou Mega Drive (avec le SVP : Sega Virtua Processor), et Jupiter devint Mars.
L'idée d'un add-on 32-bit avait deux objectifs : tout d'abord, proposer un hardware théoriquement peu coûteux et très performant permettant à la Mega Drive d'obtenir des capacités inenvisageables jusque-là , puis de permettre aux développeurs de s'habituer à l'architecture de la machine comparable à celle de la Saturn.
Au printemps 1994, il est décidé que le nom de code Saturn resterait le nom définitif de la machine, l'anneau de la planète symbolisant l'avenir et le support CD. Mars devient quant à lui 32X.
La console est officiellement présentée lors du CES 1994, mais malheureusement, c'est un autre jeu qui fait sensation : Donkey Kong Country sur SNES et son rendu façon image de synthèse. Cela dit, la sortie de la console est confirmée pour le mois de novembre de cette même année au Japon.
Nintendo, fière de son jeu, annonce qu'elle ne prendra pas part à la guerre des 32-bit pour se concentrer sur la génération suivante, celle des 64-bit, avec son projet Reality en collaboration avec Silicon Graphics.
En février, la presse internationale spécule sur les capacités de la Saturn et annonce un lecteur CD quadruple vitesse et la possibilité d'afficher 900 000 polygones seconde... En Mai, le 32X est lancée (voir notre dossier).
Titan (connu aussi en tant que; STV : Sega Titan Video-System), satellite de Saturne, et accessoirement pendant arcade de la Saturn est lancé. Il est techniquement quasi identique à la future machine de SEGA, mais possède un port cartouche et est dépourvu de lecteur CD. Il est destiné non seulement à accueillir des jeux très facilement portables sur la console du fait de leurs architectures identiques, mais également à élargir l'offre de hardware arcade de SEGA : une sorte de machine bon marché comparé au Model 2.
La Saturn sort au mois de novembre 1994 au Japon, et Hideki Sato et la Away Team ont fait de l'excellent travail au regard du peu de temps dont ils disposaient ; la Saturn est techniquement d'un niveau comparable à la PlayStation, sa puissance brute est même sans doute supérieure. Toutefois, son architecture établie dans l'urgence engendre une certaine difficulté pour en tirer le plein potentiel, et elle qui voulait faire travailler les deux SH2 en parallèle se retrouve en configuration Maître/esclave. De plus, les kits de développement ne sont pas au point.
Techniquement, autour des deux SH2 cadencés chacun à 28,6 Mhz et développant 25 MIPS gravitent une multitude de processeurs, comme une borne d'arcade donc : deux processeurs graphiques, le VDP 1 qui gère les sprites, les calculs géométriques, les textures, l'ombrage de gouraud, et le VDP 2 qui gère les décors de fond, les scrollings, jusqu'à 5 arrière plans, la gestion de 2 plans de jeu simultanés avec rotation ; le fantastique processeur sonore CSP qui utilise un MC 68EC000 à 11,3Mhz (un 68000) et un processeur Yamaha FH1 à 22,6Mhz, capable de gérer 32 pistes PCM, 8 pistes FM et un échantillonnage à 44,1Khz.
La RAM est partagée entre les VDP 1 et 2, le buffer CD-Rom et le CSP pour un total de 4,5 Mb, la console est capable d'afficher 500 000 polygones ombrés par secondes et 200 000 texturés, le tout servi par des résolutions de 320x244 à 720x576 points et une palette de 16,5 millions de couleurs en 24 Bits.
La Saturn est résolument tournée vers le multimédia, très en vogue à l'époque : de base elle lit les CD audio, les CD+G, les CD+EG, et avec la carte MPEG permet de lire les films au format MPEG1 et de transformer la console en lecteur Vidéo-CD et même de lire les CD photo via le CD Operating System mis au point par Kodak.
Sa sortie est un succès, les files d'attente ne désemplissent pas. Elle coûte 44 800 yens, et Virtua Fighter est le fer de lance du line-up. En deux jours les 250 000 machines disponibles pour le lancement sont vendues.
La Saturn se vend bien et même mieux que la PlayStation : son lancement est le plus réussi des consoles SEGA, et le plus fructueux de son histoire au Japon. Ceci étant, petit à petit la machine de Sony refait son retard, car si Virtua Fighter fait vendre des consoles, c'est le seul bon jeu du lancement alors que la PlayStation propose des jeux visuellement plus spectaculaires.
Lors de l'E3 1995, SEGA annonce la sortie américaine pour le jour même et pour un prix de 399 Dollars, croyant frapper un grand coup, mais Sony réplique immédiatement annonçant un prix inférieur de 100 Dollars... le fameux "299". Le nombre de machines disponibles étant faible, et les chaînes de production dépassées, seuls quelques revendeurs obtiennent le droit de vendre la Saturn, ce qui provoque la colère des autres. A cela s'ajoute le faible nombre de jeux disponibles, ce qui plombe le lancement américain.
L'Europe accueille enfin en dernier, comme c'était toujours le cas à l'époque, la machine, le 8 juillet 1995, soit deux mois avant la sortie de sa concurrente. Là encore, Virtua Fighter est la figure de proue du line-up, mais son prix de 3399 Francs est plus qu'un frein et les ventes ont du mal à s'envoler. La PlayStation sortira au mois de septembre pour 2099 Francs, et même si SEGA réajuste le prix de sa console, le marketing de Sony empêchera quasi définitivement la Saturn de jouer sa chance.
Critiqué sur le rendu visuel de ses jeux, SEGA commence pourtant à démontrer les qualités de sa machine dans le domaine de la 3D, comme avec Panzer Dragoon, Virtua Fighter Remix, qui réajuste graphiquement le premier VF ; Daytona USA, malgré une finition discutable propose le gameplay de l'arcade, et Virtua Cop est converti d'une manière très fidèle à la borne, et accompagné du Virtua Gun.
Les jeux de seconde génération apparaissent : Sega Rally et Virtua Fighter 2, qui inaugure l'affichage haute résolution, sont de véritables claques, que ce soit au niveau de la réalisation ou du gameplay, tout comme Virtual On. Pourtant, en occident, la Saturn ne réussit toujours pas à convaincre le grand public, malgré le soutien d'éditeurs tiers, comme Capcom ou SNK qui alimentent la machine en perles 2D dont les versions Saturn démontrent l'avantage de celle-ci sur la PlayStation. Mais la 2D n'est plus en vogue...
Les jeux 3D multisupport sont quant à eux le plus souvent moins bien réalisés sur Saturn, la faute à son architecture toujours difficile à appréhender et souvent au manque de patience des développeurs pour maîtriser la machine. En effet, la console, qui s'est toujours trainé comme un boulet la réputation d'être moins puissante que sa concurrente dans ce domaine, a une particularité : pensée au départ pour être un monstre dans le domaine de la 2D, elle ne calcule pas la 3D comme les autres machines ; en fait, elle n'affiche pas des triangles mais des quadrilatères, elle génère des sprites, choisit la position écran de leurs quatre coins, et les déforme, ce qui demande plus de ressources aux processeurs.
Sur le front des 16-bit, SEGA prévoit une fois de plus de remplacer sa Mega Drive, comme ce fût le cas avec Jupiter. Cette fois-ci, c'est le projet Neptune qui est présenté : une console incorporant une Mega Drive et un 32X, annoncée à 200 Dollars et sans doute destinée à corriger les problèmes de compatibilité entre les différents modèles de Mega Drive et le 32X, et au design étudié pour accueillir un Mega-CD 2. A terme, la machine devait remplacer à la fois la vieillissante 16-bit et son module 32-bit optionnel. La console ne verra jamais le jour, et malgré la conception de plusieurs prototypes, un seul parviendra jusqu'à nous et sera révélé en 2001.
En octobre 1995, SEGA annonce à Tokyo le projet "Internet Saturn" comme le dévoilera le HS MegaForce N°4 de décembre 1995, fruit selon les informations du magazine de la collaboration avec Nissan et Aplix Corporation. La promesse de pouvoir accéder à Internet et de jouer en ligne. Un disque dur, un clavier, une souris et un modem sont également annoncés.
En 1996, SEGA sort une nouvelle version de la Saturn, afin d'améliorer les coûts de production, et changer l'image de la machine. Pour ce faire, le Japon voit apparaître Segata Sanshiro, qui devient rapidement l'ambassadeur de la console. Malgré tout elle peine toujours à décoller aux Etats-Unis et c'est encore pire en Europe, de plus le public attend un Sonic qui ne sortira jamais.
Pourtant, la Sonic Team fait mieux et commercialise NiGHTS: Into Dreams, véritable trésor vidéo ludique dans lequel le joueur incarne un personnage évoluant dans les airs. C'est aussi l'occasion pour la firme d'accompagner le jeu par la sortie du deuxième pad analogique de son histoire.
Malgré une myriade de titres de qualité, la bataille est perdue en occident, la faute à un marketing inexistant ou à côté de la plaque d'un SEGA qui ne sait pas soutenir sa console là ou Sony est un rouleau compresseur.
La Nintendo 64 débarque à son tour sur le champ de bataille, armée de Mario 64, Turok ou Wave Racer, la guerre est désormais totale.
Finalement, Tom Kalinske quitte SEGA, tout comme Joe Miller. Bernie Stolar prend la présidence de SEGA Of America et impose des décisions draconiennes, licencie et interrompt toutes les campagnes marketing dans l'espoir de diminuer la perte d'argent engendrée par l'échec de la console. En effet, en janvier 1997, seules 1.7 millions d'unités ont été vendues aux Etats-Unis, et c'est encore pire en Europe, où à peine 900 000 consoles ont été vendues...
Pourtant au Japon, elle se porte bien et fait jeu égal avec sa concurrente : 4,4 millions de machines font le bonheur de leurs acheteurs, et sa ludothèque fourmille de RPG et de shoots de grande qualité, ainsi que de Versus Fighting qui pour la plupart ne franchiront jamais les limites de l'archipel nippon.
Malheureusement en juin 1997, un événement va changer la donne : SquareSoft sort Final Fantasy VII, un "RPG Next-Gen".
Le jeu est plus qu'un succès, c'est un tsunami : en trois jours, 2,5 millions de copies sont écoulées. Il fait vendre des PlayStation, et cette dernière reprend pour toujours l'avantage sur la Saturn.
En juin de cette même année, un accord est sur le point d'être signé avec Bandai, qui pourrait sauver la machine tant le catalogue de licences de la firme est étendu.
Bandai se cherche un partenaire, sa licence Power Rangers étant en perte de vitesse depuis quelques temps, et après les échecs de la Playdia et de la Pippin, conçue en collaboration avec Apple, SEGA semble être un allié de poids. La nouvelle entité SEGA-Bandai Ltd serait présidée par Isao Okawa, Nakayama serait son CEO, et enfin en troisième position viendrait Makoto Yamashina de Bandai, toutefois, l'accord n'aboutira pas, scellant peut-être pour de bon le sort de la console.
C'est à ce moment-là que Nakayama prend du recul vis-à-vis de l'entreprise. Son vice-président Shoichiro Irimajiri assurera ses fonctions jusqu'à être officiellement nommé l'année suivante.
Malgré tout, SEGA, loin de baisser les bras, commercialise pourtant sur les trois marchés le NetLink, un modem de 28,8K même si sa diffusion en Europe reste confidentielle. Il permettra à la Saturn de proposer des jeux jouables en ligne comme Daytona CCE NetLink Edition ou Saturn Bomberman, ainsi que le surf sur internet.
En mars, la presse spécialisée croit savoir que l'entreprise travaillerait sur de nouveaux projets et parle de Pluto, Saturn 2, Dural ou Katana.
En coulisses, SEGA travaille en effet sur plusieurs projets, et a donc activé Pluto, un ensemble regroupant une Saturn et un Modem NetLink, le tout recarrossé dans une machine sans doute pensée pour être moins chère qu'une Saturn de base. Si elle était sortie, elle aurait été la première console de jeu équipée d'un modem de série.
En 2013 d'ailleurs, la rumeur Pluto a enfin être confirmée avec l'apparition de deux prototypes, l'un blanc et l'autre noir, le premier étant une coquille vide, sans doute destinée à tester le design, et le second une machine tout à fait fonctionnelle.
Pourtant, en cette année 1997, c'est le projet Saturn 2 qui suscite le plus de rumeurs. Certaines évoquent une nouvelle console, d'autres un module 64-bit destiné à la console, à l'instar de la 3DO M2 : le projet Eclipse.
Eclipse est une réalité ; SEGA demande en effet à Martin Marietta (Lockheed Martin) de concevoir un add-on Saturn qui bien entendu ne sortira jamais, sans doute à cause du coût d'une telle machine.
En cette fin d'année, petit à petit la Saturn cesse d'être produite et au début de l'année 1998, Isao Okawa décide d'arrêter les frais pour sauver ce qui peut encore l'être, restructure l'entreprise et se concentre sur le successeur de la Saturn qui deviendra la Dreamcast, mais c'est un chapitre que nous aborderons sans doute un autre jour...
Sources :
MegaForce
Consoles +
Edge
MegaTech
Sega Power
Sega Pro
Service Games : The Rise an Fall of SEGA
Special Thanks : Spin-dash, merci pour tout, TontonSEGA pour la partie deuxième partie à venir.
Commentaires
Super dossier et vivement le prochain sur la Dreamcast :oui:
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Super boulot:love:
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la saturn m'a jamais tenté mais a lire c'est plaisant
je suis plus fan de la md c'était ma 1ere console de salon en 1991
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dommage que le projet Sega Neptune "megadrive ameliorée M68k de sh1" n'est pas été retenu en lieu et place du champignon atomique qu'est le 32X
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