Test : Nanatsu Kaze no Shima Monogatari (Saturn)

Dans la quantité malheureusement énorme de jeux Saturn restés exclusif au Japon, on trouve un peu de tout, notamment beaucoup de titres difficilement accessibles sans une bonne compréhension de la langue.
Nanatsu Kaze no Shima Monogatari d'Enix en est le parfait exemple ; ce n'est pas forcément un drame lorsqu'on a à faire à un jeu moyen voire médiocre, mais lorsqu'il s'agit d'un titre de son calibre c'est une toute autre histoire...

Un dragon qui crache ses poumons

Bienvenue dans le Conte de l'Île aux Sept Vents (traduction du titre), on y incarne une sorte de petit dragon vert grassouillet pas vraiment doué au sprint : Garp.
Il n'a pas trop la tête d'un héros de jeu vidéo, il semble plus sortir d'un livre d'images, et ça tombe bien puisque c'est un peu le concept.
Né sous la plume de Keita Amemiya qui est à la fois réalisateur et illustrateur de renom, le monde qu'il nous a concocté est visuellement très riche et original.
Ce monsieur a travaillé sur énormément d'œuvres diverses dont Garo, Ultraman, Onimusha, Genji ou encore Dororo, bref, ce n'est pas le premier venu.
Sur son site officiel il est possible d'y apprécier son travail, je vous laisse le lien ici-même vous conduisant directement sur les illustrations de Nanatsu Kaze no Shima Monogatari, mais cela ne doit pas vous empêcher de jeter un 'œil sur ses autres travaux.

Éclosion d'une œuvre

Une île minuscule dans le ciel, avec pour seul présence un cocon.
C'est le moment de naître, non, renaître pour être exact, et ce, en sortant tant bien que mal de cet espace exigu dans lequel on a passé un temps dont on a aucune notion.
Il n'y a rien sur ce minuscule point dans le ciel mis à part nous, tout au plus une plume noire... tiens mais pourquoi me fait-elle ressentir tant de nostalgie ? Pourquoi ai-je l'impression d'avoir un lien avec elle ?
Je n'ai même pas le temps de fouiller dans mes souvenirs, qu'une terrible rafale de vent d'un noir inquiétant me fait rouler bouler m'entraînant dans une chute de plusieurs dizaines de mètres.
Elle prend fin sur un terrain qui me laisse enfin de quoi me dégourdir mes jambes potelées.
J'ai beau sortir d'un cocon, je suis déjà bien rondouillard, pas vraiment charismatique, je peux me vanter d'être unique et attachant.
Une graine tombe du ciel, je la plante dans un endroit débordant de verdure, et une maison en forme d'arbre sort du sol comme par magie, ça tombe bien, ce monde en regorge.

Jetons un 'œil à notre petit nid. Ce n'est pas des plus spacieux mais très mignon et déjà meublé.
Une belle étagère malheureusement vide, je me demande bien à quoi elle va me servir ?
Oh et cette chaise ? Elle épouse parfaitement mes formes, idéal pour faire une petite sieste si je venais à avoir besoin de me poser pour ensuite reprendre mon aventure d'ici.
La magie est même dans mon salon dis-donc, un énorme livre flotte au-dessus de la table basse.
Chouette c'est un livre d'images ! Tiens, mais cette histoire je la connais, c'est... la mienne ?! Toutes les choses que j'ai vécues y sont retranscrites à l'identique donc !
Cet énorme ouvrage contient aussi un descriptif complet de tous les àƒÅ tres de l'île sur laquelle je viens d'atterrir, c'est fantastique, ils sont tous différents et originaux !
Wouah, une fraise-poisson et une mouche grenouille, et aussi des arbres qui parlent ! Ce monde semble incroyable et je devrais y faire des rencontres fabuleuses.

Bon, c'est bien beau tout ça, mais moi je veux visiter cette île maintenant !
Hein ? Mais c'est une plaisanterie ou quoi ? Je ne peux pas sortir ?!
Au-dessus de la porte il y a une sorte de visage qui me parle ? Quoi ? Tu veux savoir comment tu t'appelles pour me laisser passer ? Mais je n'en sais rien moi !
Bon allez, je vais entrer un nom au hasard et ça devrait marcher non ?
Aller je vais te nommer... Pancake ! Oui j'aime bien les pancakes, je fais ok et... Non ? Tu veux ton vrai nom, je n'ai pas le choix ?

Me voilà bien embêté... Ah ! Le livre ! Mais oui, ton nom est dans le gros livre comme pour tous les habitants d'ici bien entendu, ouf.
J'ai trouvé. Je suis heureux de comprendre le langage des gens de cette île sinon j'aurais été condamné à rester indéfiniment dans ma cabane. Je crois bien que sans une bonne compréhension, le reste de l'aventure serait de toute façon quasiment impossible.
Fin du prologue, me voilà enfin prêt, ouvrons cette porte pour y découvrir ce monde à travers les 12 chapitres qui m'attendent.

 

Le bon conte fait les bons amis

Garp va essayer de se souvenir de son passé, de son lui précédent, qui était-il ? Que faisait-il ? Avec qui était-il ? Et ce vent noir qui l'a fait tomber d'où vient-il ? Beaucoup de questions auxquelles notre aventure apportera des réponses avec beaucoup de poésie, de tendresse et de magie.
Parce qu'ici, nous sommes loin des standards du genre, pas de combat, de mort ou de game over, non, ici c'est du rêve, tel un conte pour enfant, tout simplement.
On progresse en parlant aux habitants qui nous donnent des indications souvent vagues, obligeant à se creuser un peu la tête pour savoir où aller et quoi y faire.
Cela peut par exemple être le fait de remettre un objet à quelqu'un, exploiter les capacités de nos copains ou utiliser un des vents dont nous détenons le secret (j'y viens).
Parmi les personnages peuplant l'île, on fait rapidement la rencontre de nouveaux compagnons qui nous donneront un coup de main sur demande en faisant retentir une sorte de corne de brume.
Notre premier comparse est une sorte de lapin bleu avec des ciseaux à la place des mains, permettant le plus souvent de désherber pour trouver des insectes.
Le second ressemble à une sorte de chien/oiseau (enfin je ne sais pas vraiment...) nous donnant la possibilité de voler, alors que le troisième dont je ne sais comment le décrire, détruit de son cri certains objets comme les pierres. Dans certains cas, nos 3 copains se montreront absolument indispensables afin de progresser.

Avoir les vents en poupe

Comme le titre l'indique il y a 7 vents, tous représentés par une couleur différente.
•Orange : Sa chaleur douce permet de guérir
•Vert : Il fait vibrer la nature
•Jaune : A un effet d'engourdissement
•Violet : Révèle les secrets
•Bleu clair : Nous fait rétrécir
•Rouge : Sa puissance en forme de tornade creuse des passages dans le sol
•Secret : Son pouvoir et sa couleur sont un mystère qu'il nous faudra élucider

Bien entendu, il faut avancer pour apprendre leur utilisation, et au début nous n'en maîtrisons aucun, notre rencontre avec le " Lion du vent " sera déterminante puisqu'il nous guidera dans l'acquisition de ces mystérieuses capacités.
Il faut sans surprise s'en servir aux bons endroits, faire intervenir ses amis aux bons moments, mais aussi utiliser les objets clefs et parfois écrire en...japonais.
S'il est possible d'avancer en essayant tout et n'importe quoi dans certains jeux, Nanatsu Kaze se montre beaucoup moins clément.

En effet, même en comprenant le japonais, il est parfois difficile de savoir quoi faire tant certaines indications sont volontairement vagues. Le pompon pour le non japonisant, ce sont les quelques passages exigeant d'écrire en japonais un mot bien précis comme je l'expliquais avec la porte.
Autant dire que celui qui comprend pas du tout la langue signe direct pour un aller sans retour dans le " je tourne en rond depuis des jours et des jours et je ne peux plus rien faire ".
Comme je le disais plus haut, pour avancer, certains personnages nous donnerons des indications, parfois claires et simples, parfois beaucoup plus vagues. Ce n'est pas forcément une mauvaise chose, se creuser un peu la tête ne fait pas de mal, mais par moment ce n'est vraiment, mais alors vraiment pas clair.
Parmi ceux nous donnant des indications je pense à l'espèce d'escargot vieillard géant, lorsqu'on ne sait plus quoi faire, il nous donne souvent un petit début de réponse toujours bienvenue.

Aussi beau à l'intérieur qu'à l'extérieur

Keita Amemiya n'a pas seulement dessiné les personnages et créatures, mais aussi les décors. D'un point de vue visuel le jeu fait très fort, la plupart sont superbement bien travaillés, toutefois on ne se déplace que d'écran en écran, comme dans Another World par exemple (ce style s'appelle flip-screen d'ailleurs).
Aucun scrolling donc, ce qui n'est pas vraiment gênant si ce n'est le petit temps d'attente nécessaire entre chaque changement, pas rédhibitoire certes, mais sur les 20/25h de jeu on peut parfois pester par ce manque de rythme.
Et en parlant de rythme, Nanatsu Kaze opte pour un style très lent, il prend son temps un peu partout, parfois un peu trop même, comme par exemple au changement de notre compagnon.
Pour cela, on donne un coup de corne de brume, le premier perso part tranquillement et le second prend sa place tout aussi lentement, et oblige à redonner un coup de corne afin de lui faire exécuter son action ; c'est un détail, mais cela, cumulé au reste, fait qu'on tape souvent du pied.
Et sans oublier l'inquiétude en faisant le prologue et le chapitre 1 en ne pouvant que marcher, il faut attendre le 2 pour enfin pouvoir courir...
Mais d'un autre point de vue, cette ambiance bucolique et onirique sans pression est des plus reposantes après une longue journée de travail. Surtout que son ambiance sonore est super relaxante, juste le bruit de la nature et des insectes pour nous accompagner, les belles musiques se font entendre principalement dans les intérieurs.
Sa narration, son histoire, son monde (qui peut d'ailleurs faire penser à du Tim Burton durant certaines cinématiques) font qu'il ne lui manquait pas grand-chose pour atteindre la perfection.

On croise toutes sortes d'insectes, poissons et autres créature bizarres, voire improbables. Il est d'ailleurs possible, soit pour le plaisir soit par obligation, de capturer des insectes avec un accessoire spécifique ou encore, avec notre canne à pêche, de découvrir des espèces de poissons inhabituelles.
Les insectes, poissons, plantes et pierres qu'on récupère peuvent ensuite être apportés aux collectionneurs de chaque variété, et seront ensuite exposables sur l'étagère dont je parlais au début.

Une belle histoire qui fini mal

Comme je l'expliquais au début, la galette renferme un système original qui écrit notre histoire au fur et à mesure, se nommant le " Book Making ".
Mais cela veut donc dire que d'une aventure à une autre le contenu sera différent ? Malheureusement non, c'est plus dans les détails qu'on trouve des nuances, pas plus, l'histoire reste la même quoiqu'il arrive, mais cela n'enlève rien au fait que c'est une idée hautement sympathique.
Le jeu est aussi accompagné d'un CD bonus permettant de retrouver les magnifiques illustrations des personnages, décors, les croquis et même quelques bestioles qui n'apparaissent pas dans le jeu final.
Mais chose triste, malgré toutes ses qualités, cette magnifique aventure n'aura pas su séduire les joueurs japonais.
On peut malheureusement dire qu'il a fait un gros bide et cela doit sûrement expliquer pourquoi il n'a jamais eu de conversion ailleurs, et encore moins de suite.
Quand je dis bide je n'exagère pas puisqu'il ne s'en est vendu que 5500 exemplaires lors de sa première semaine de commercialisation alors que les gros jeux de la machine de l'époque pouvaient faire largement plus de 100k...
Bref, un destin triste pour cette œuvre marquante et unique.

Une aventure atypique, des personnages attachants, une histoire d'amitié profonde, un monde magique et magnifique qui a marqué mon expérience de joueur comme rarement.
Malheureusement ce conte est réservé uniquement aux japonisants et c'est vraiment dommage.
Si le rythme général est il est vrai un peu trop lent, et nous fait parfois un peu trop tourner en rond, ce " Conte de l'Île aux Sept Vents " se révèle être une superbe réussite de la part d'Enix sur notre belle 32 bits.
Une perle, tout simplement.

•Compatible cartouche de sauvegarde
•47 blocs par sauvegarde dans la limite de trois

Compréhension du japonais absolument indispensable pour apprécier et surtout progresser !

Verdict

9

Points forts

  • Un monde et une ambiance uniques
  • Sublime dans tous les sens du terme
  • Histoire touchante et personnage attachant
  • Le livre d'image qui s'écrit avec notre progression
  • CD bonus faisant honneur au jeu

Points faibles

  • Rythme global un peu trop lent
  • Il nous fait bien marcher et tourner en rond

Commentaires

Genial merci pour ce test. Un jeu que j ai toujours voulu faire mais je n avais pas pris le risque de le prendre (a cause de la langue).
Rage, 18 Juil 2019 - 11:35
Merci pour ce test d'un des derniers jeux du grand Enix avant de mourir au sein du groupe Squaresoft en 2003 :good::good: Faudrait que je le chope un de ces jours celui là :oui: