Test : Total War : Shogun 2 (Windows)

Nous sommes au Japon en 1545. Le pays est dirigé sans partage depuis 200 ans par une puissante famille Shogun. Pour les nombreux clans en présence, il est temps de bouleverser la hiérarchie et de renverser le pouvoir. Dix ans après le premier shogun, qui marqua le début de la série Total War, The Creative Assembly revient aux sources du Japon Féodal avec Shogun 2. Dix années pendant lesquelles la série aura traversé l'histoire et les continents au fil de nombreux épisodes pour à nouveau se retrouver au pays du Soleil Levant et qui semble parée pour nous offrir une suite digne des attentes des fans de Shogun.

C'est reparti pour un (grand) tour

Dès le départ l'introduction annonce la couleur : un duel splendide aux animations criantes de vérité entre un chef samouraï et un guerrier qui tente de s'emparer du château, le tout sur fond de nature changeante typiquement japonaise.
Arrivé à l'écran titre, on retrouve les traditionnels modes solo (grande campagne, batailles historiques ou personnalisées) et multijoueur.
La grande campagne représente le plat de résistance solo du jeu. On désigne au départ le clan que l'on souhaite contrôler parmi neuf disponibles. Un choix important qui déterminera la difficulté de la campagne (l'emplacement de chaque clan est différent sur la carte et les ennemis en présence seront plus ou moins nombreux) ainsi que notre façon de combattre. Par exemple, Les Chosokabe recherchent la maîtrise de l'arc, les Date forment des samouraïs spécialistes du combat à l'épée, les Takeda privilégient la cavalerie alors que les Hojo sont spécialisés dans les techniques de siège. Rien n'empêchera plus tard d'acquérir toutes ces aptitudes dans son clan mais la spécialité de chacun permet de recruter à moindre frais ou d'obtenir des bonus de dégâts dans l'art qu'il maîtrise le mieux.

Hara Kiri de la série ou simple évolution ?

Avec shogun 2, on pouvait penser à un remaniement complet de la série, ce qui n'est pas réellement le cas. Outre l'univers féodal japonais qui change radicalement des précédents opus, le jeu s'inscrit dans la continuité des autres. Tout est question ici de dosage et de rééquilibrage de la gestion stratégique et des batailles. De nombreuses nouveautés très intéressantes ont aussi fait leur apparition, on y reviendra plus tard.
Pour commencer, retour sur une carte beaucoup plus petite que les précédentes : le Japon. La période concernée, du point de départ jusqu'au renversement du shogun à Kyoto est aussi plus courte. Ces deux paramètres ont pour effet direct de donner beaucoup plus d'importance à nos choix sur la carte. Une erreur de gestion sera plus pénalisante car le temps de manœuvre est réduit par rapport aux actions de l'ennemi.
Dans Shogun 2, la gestion devient plus complète tout en étant simplifiée. Il y a moins de paramètres à régler, notamment au niveau des villes, qui pouvaient perdre le joueur ne sachant pas trop les conséquences de certains ajustements.
Cette simplification bienvenue laisse place à plus d'aspects intéressants à gérer, à commencer par une implication étroite dans le clan et la famille.

La famille avant tout

En tant que Daimyo, le joueur doit veiller à la bonne harmonie du clan et constituer une hiérarchie en nommant les personnes importantes (enfants, conjoint, généraux...) aux postes clés ( conseiller militaire, financier ou au développement ) ce qui aura pour effet de garantir leur loyauté car le soudoiement est monnaie courante dans Shogun 2.
La famille occupe une place très importante dans le clan, les fils arrivés à maturité deviennent à leur tour de précieux généraux, la femme du Daimyo peut devenir chef du clan si son mari périt au combat. Les plus jeunes enfants peuvent même être confiés à un clan adverse en guise de garantie lors d'un accord diplomatique ou commercial. Ceux-ci seront sans pitié si les engagements ne sont pas respectés !
Parfois, un noble peut proposer sa fille en mariage à un des membres du clan. Celle-ci aura des effets directs sur son mari en fonction de son caractère. Une femme au caractère acariâtre procurera certains bonus à son général comme la possibilité de se déplacer plus loin sur la carte mais baissera en contrepartie son niveau de loyauté. À plus grande échelle, le Daimyo doit aussi gouverner sa province dont le développement du clan dépendra de sa bonne gestion. Cela passe tout d'abord par la reconnaissance de son peuple pour éviter toute rébellion désastreuse. De nombreux moyens sont à disposition comme construire des lieux de divertissement ou abaisser les impôts. Construire un port de pêche et des fermes évitera la famine.
Coté finances, le commerce, la culture et les impôts produiront les revenus nécessaires.

Pas de gloire sans guerre

Il ne faut cependant pas oublier que notre but ultime est de conquérir les provinces jusqu'à Kyoto et renverser le shogun. Cela passe évidemment par le déploiement militaire. La encore, The CA a fait du ménage et a réduit drastiquement le nombre d'unités différentes par rapport aux derniers Total War en date, ce qui ne constitue pas en régression en soi. Les derniers épisodes proposaient un large éventail d'unités aux différences pas toujours très marquées et le joueur finissait souvent par n'en utiliser qu'une poignée parmi les plus efficaces.
Dans Shogun 2, le joueur doit d'avantage s'intéresser aux aptitudes de ses troupes, ses forces et ses faiblesses.
On trouve 3 grandes classes de combattants dans Shogun 2 : le corps à corps (samouraï, piquiers..), le combat à distance (archers, fusilleurs à mèche, engins de siège...), et la cavalerie.
Chacune d'elle dispose de techniques spéciales que l'on débloque en construisant des centres d'entraînements adéquats et grâce à l'arbre technologique. Ainsi les archers pourront tirer des salves de flèches enflammées très efficaces, les piquiers pourront dresser un mur de pique afin de stopper net l'assaut de la cavalerie (pour en connaître l'efficacité, regardez Braveheart !). Cette dernière pourra adopter une formation en triangle pour percer plus efficacement une lignée de soldats.

L'expérience fait la différence

Le deuxième point très important concernant l'armée est l'expérience acquise par nos guerriers et généraux.
Prenons un exemple concret : Si une unité de samouraï composée au départ de 200 hommes ressort victorieuse d'une bataille, celle-ci acquiert de l'expérience même s'il n'en reste que la moitié. La présence d'un général permet à celle-ci de se régénérer au fil des tours si elle est placée au repos loin des combats. Vous verrez donc un intérêt à effectuer un roulement pour préserver les unités qui ont plus d'expérience. En contrepartie, vous avez moins d'hommes à disposition et il n'est pas rare d'envoyer une précieuse unité expérimentée en convalescence lorsque les attaques de l'ennemi sont trop nombreuses.
Les généraux gagnent aussi de l'expérience et disposent même, à la manière d'un RPG, d'un arbre de compétence personnel avec des points à distribuer permettant de débloquer des bonus d'efficacité ou nouvelles compétences.
Tous ces paramètres rendent les batailles hautement stratégiques et dans cet épisode, les renversements de situation sont très fréquents. Restons dans le domaine de l'évolution avec le traditionnel arbre technologique. Celui se nomme désormais " Maîtrise des arts " et est divisé en deux grandes catégories : Le bushido et la voie du chi. La première permet de développer l'art de la guerre en améliorant les capacités offensives et défensives des unités et donne la possibilité de débloquer de nouvelles attaques spéciales. La seconde est axée sur la voix du Zen et permet d'améliorer par exemple les rendements financiers grâce à de nouvelles techniques agricoles ou en diminuant les coûts d'entretien.

Devenir un bon gestionnaire

La réussite dans Shogun 2 réside dans le périlleux équilibre entre la satisfaction de la population, la production de richesses et le développement d'une armée. Ces trois paramètres sont intimement liés et savamment dosés dans cet épisode.
Un joueur qui produira une gigantesque armée aura des coûts d'entretien trop élevés et ne pourra subvenir aux besoins de la population ce qui mènera le royaume à sa perte. Inversement, un clan riche avec une petite armée ne fera pas long feu face aux assauts de l'ennemi.
Heureusement, le jeu nous permet de recruter des agents très spéciaux pour nous faciliter la tâche à l'aide de techniques aussi sournoises qu'efficaces.

Tous les moyens sont bons

Ainsi, le moine peut influencer la population et provoquer des crises religieuses alors que le Metsuke saura corrompre un général adverse à la loyauté discutable.
Enfin, le plus intéressant et le plus fun de tous, le ninja, véritable guerrier de l'ombre capable d'assassiner des personnages clés en toutes discrétion, saboter une armée en empoisonnant l'eau la veille d'un combat ou endommager les portes de la ville pour faciliter la progression de l'envahisseur.
Ces actions affichent un pourcentage de réussite selon l'expérience de l'agent et la cible concernée et donnent lieu à de petites cinématiques au ton décalé et humoristique bienvenu qui indique le déroulement de l'opération.
Il ne faudra pas hésiter à user de tous les moyens nécessaires car l'ordinateur sera sans pitié. L'IA qui était déjà d'un excellent niveau dans les anciens Total War semble encore s'être peaufinée dans Shogun 2. Le comportement de l'ennemi peut s'avérer imprévisible, sans pitié et laisse place à peu d'aberrations. On ne le verra jamais attaquer un château avec une armée ridicule.
Il n'hésitera pas à endommager les fermes pour bloquer les revenus ou les infrastructures pour empêcher le recrutement de nos unités et dans la foulée à attaquer la ville. Prévoyez une armée de réserve à proximité !
Avant d'attaquer un clan, regardez d'abord à qui vous avez à faire dans la fenêtre de diplomatie. Si celui-ci est allié avec d'autres clans et que votre empire n'est pas encore très puissant, ne tentez pas l'impossible. Inversement, vous pouvez tenter de conclure une alliance commerciale ou militaire pour faciliter votre progression. Rien ne vous empêchera par la suite de se retourner contre votre ancien allié ! Tous les coups et surtout les plus bas sont permis dans Shogun 2. Et vu le nombre de clans différents que compte le Japon médiéval de 1545, le joueur devra consacrer une bonne partie de son temps à la diplomatie s'il veut se faire une place aux pays des shoguns.

Un jeu pour les riches ?

Venons en maintenant à la partie technique et rassurons d'emblée l'ensemble des joueurs : Shogun 2 n'est pas le monstre de puissance que laisse supposer les screens remplis de milliers d'unités aux détails flamboyants. Les batailles en 3D ne demanderont guère plus de ressources que Napoleon, j'ai même trouvé le moteur incroyablement stable, optimisé et peu buggué. Et comme toujours, une multitude de réglages permettra de faire tourner le jeu dans presque toutes les configs. Notons au passage une amélioration sensible de la carte stratégique qui fourmille de détails et petites animations. Par contre, le nombre élevé de clans sur la carte mettent le processeur à rude épreuve et certains tours sont parfois longs à arriver, le temps de calculer l'IA de chaque clan.
Si shogun 2 n'est techniquement pas plus impressionnant qu'un Napoleon, l'habillage est remarquable de fidélité et de respect de l'époque. L'ambiance sonore colle parfaitement et l'interface est l'une des plus belle, claire et fonctionnelle qu'il m'ait été donné de voir.
Et pour couronner le tout, The CA a carrément implanté un mini encyclopédie qui s'active en temps réel dès que l'on souhaite accéder à des informations sur un clan, une troupe ou ou tout autre sujet qui touche au jeu et à son contexte. Une mine d'or d'informations.

Le multi-vitaminé

Finissons par le multijoueur où Shogun 2 propose du solide et va beaucoup plus loin que ses aînés.
Pour commencer, un joueur humain peut s'incruster dans n'importe quelle campagne solo d'un autre joueur connecté et remplacer l'ordinateur si l'option bataille impromptue est activée.
On retrouve aussi avec plaisir le mode coopération qui permet de à 2 joueurs de diriger chacun un clan dans la campagne et de partager leurs unités.
Mais la grande nouveauté se situe dans le mode conquête de l'avatar, véritable jeu dans le jeu. Il consiste à créer et à faire évoluer son général sur une map peuplée d'adversaires humains dans le but d'intégrer le classement mondial des shoguns. L'expérience acquise au fil des batailles permet de débloquer de nouvelles unités et compétences ainsi que de nombreux accessoires pour se pavaner et donner une idée du niveau de notre armée.
Tout comme en solo, il est possible de conclure (et dissoudre) des alliances entre les différents joueurs chef de clan. Attention à qui vous vous adressez ! La carte a aussi son importance puisque selon les provinces conquises, on débloque divers bonus très utiles. Avec ce mode, on se retrouve devant une véritable campagne en ligne dans un monde persistant face à des adversaires humains, l'expérience ultime d'un Total War.

La consécration

Avec shogun 2, The CA ne révolutionne pas sa série mais touche l'excellence dans la série qu'elle a entreprise depuis 1999. Le retour au Japon féodal permet à au jeu d'arborer son plus bel habillage que ce soit au niveau de la 3D ou de l'interface, sans forcément être plus gourmand, tout est question ici d'esthétisme. Cet épisode est aussi l'occasion de balayer de nombreuses choses inutiles et superflues. La mécanique de gestion se simplifie tout en devenant plus complète en mettant l'accent sur la famille et les relations diplomatiques entre clans. Même traitement pour les unités, beaucoup moins nombreuses mais tellement plus intéressantes à gérer grâce à un système d'évolution très complet. Notons enfin un jeu de plus en plus stable et optimisé, ainsi qu'un nouveau mode multijoueur novateur et addictif. Le dernier arrivé de la série Total War dépasse une fois de plus allègrement ses prédécesseurs, et ce, sans révolutionner le jeu. On peut éventuellement se demander si un jour la série ne connaîtra pas un petit essoufflement, mais il est clair qu'on profite actuellement du summum en matière de stratégie et on a déjà hâte d'imaginer la suite.

Verdict

9

Points forts

  • Esthétiquement envoûtant
  • Interface classieuse
  • Gestion simplifiée... et complète
  • Durée de vie solo colossale et son nouveau multi
  • Techniquement stable et solide
  • Recette inchangée toujours efficace...

Points faibles

  • Mais jusqu'à quand ?
  • Changement de tour longuet
  • Phases navales encore en retrait

Commentaires

yohko kurama, 07 avr 2011 - 2:36
Heu ça donne sacrément envie là . Assûremment le jeu SEGA le plus réussi de l'année pour le moment. Le mien restera dans sa boite encore un moment...:triste:
pixeldream, 08 avr 2011 - 7:07
Le premier grand titre de l'année pour Sega et déja la référence du genre :good: