Test : Total War : Pharaoh - Dynasties (Windows, Mac)
Après une première vague de contenu gratuit avec « High Tide » qui avait ajouté les peuples de la mer en faction jouable, CA Sofia remet le couvert, ou plutôt, sort le banquet. Au menu de Total War : Pharaoh Dynasties : plus de régions, plus de factions, plus de tout. Suffisant pour rouvrir votre appétit de conquête ? On va voir.
De nouvelles factions
En lançant votre nouvelle campagne (faites attention d’ailleurs, Total War : Pharaoh et Pharaoh Dynasties sont deux installations différentes), la première nouveauté interviendra au moment de choisir votre faction. Si celles déjà présentes dans le jeu restent évidemment, nous avons désormais accès aux peuples Egéens. Menés par respectivement Priam de Troie (enfin, Wilusa) et Agamemnon de Mycènes, ces dirigeants, bien que directement tiré d’une fiction, sont ce qui s’approche le plus de figures historiques connues dans la région. En plus de ces deux leaders, vous aurez accès à diverses factions mineures de la région, toujours tirées de l’Iliade : Achilles, Odyssée et Ajax.
À l’Est, la carte aussi s’est étendue avec désormais les deux royaumes phares de la région : Babylone et le Hanigalbat. Si dans le jeu d’origine je n’avais pas trop regretté l’absence des proto-grecs, l’absence de deux des quatre superpuissances de la période avait été une énorme déception. Si le leader de Babylone n’est pas vraiment connu du grand public (ni même du public averti), Adad-shuma-usur, il a le mérite d’être historique.
Quant au Hanigalbat, j’imagine que certains ont eu des réactions urticantes. Si le Hanigalbat est un royaume tout à fait réel de la période, reprenant approximativement les frontières de l’ancien Mitanni, le mettre en suzerain d’Assur (et donc de l’Assyrie) quand la situation historique était inverse m’a...fait vérifier. Parce qu’honnêtement, je n’étais plus sûr et Creative Assembly a plus ou moins juste. Ninurta-apal-Ekur était bien vice-roi du Hanigalbat, il a bien pris le contrôle d’Assur, mais il a fait cela après la date de début du jeu et s’est aussitôt déclaré roi de l’Univers, un titre que l’on pourrait comparer à « empereur du saint-empire romain » du Moyen-Âge. Bref le gameplay a primé sur la véracité historique et il est toujours possible de jouer l’Assyrie en faction mineure.
Revenons justement sur les factions mineures. Celles-ci, contrairement à ce que l’on pourrait croire, n'ont que très peu de contreparties puisqu'on ne perd que certaines actions spécifiques aux factions majeures. Actions qui ne doivent pas être très utile puisque je n’ai pas souvenir d'avoir remarqué leur absence. En contrepartie, comme pour les Cananéens dans le jeu de base, vous pouvez choisir pour quel trône vous voulez vous battre ou même devenir des maraudeurs, donc un peuple de la mer. Et puis elles augmentent grandement le nombre de factions jouables ; désormais Byblos, Ugarit ou Alashiya pourront espérer ne pas disparaître sous les assauts des peuples de la mer et ce sera grâce à vous !
Tiens ma carte, où sont les temples ?
Vous avez choisi votre faction, le jeu charge, vous arrivez sur la carte et là, BAM ! Un grand coup sur la table et vous dites « Merci ! ». La carte a presque doublé en taille, mais s'est surtout étendue d’Est en Ouest, l’Âge de Bronze Est-méditerranéen est enfin correctement représenté, avec tous les acteurs qui ont participé à sa géopolitique et sa chute. Oh bien sûr on pourrait pinailler, la Mésopotamie semble un peu petite par rapport à l’Egypte et l’Anatolie, on aurait aimé pouvoir aller un peu plus loin sur les plateaux iraniens ou commercer avec le royaume de Dilmun. Mais cette sensation vient plutôt de la taille de chaque province : là où au Proche-Orient on rejoint aisément la ville voisine en un tour, la Mésopotamie est plus espacée. Personnellement, je pense qu’il aurait été possible de subdiviser un peu plus certaines provinces, mais il fallait bien s’arrêter quelque part et la carte est vraiment satisfaisante.
Puisque j’ai choisi Babylone pour ma partie, je possède de base Uruk, souvent considérée comme la première ville (on estime à plus de 30 000 habitants sa population à la fin du IVe millénaire). L’objectif ? Rendre son prestige à la ville et à sa déesse Ishtar.
J’aurais dû me douter que tout était trop parfait jusqu’ici, il fallait bien un gros raté. Dans le test original je n’avais rien eu à redire sur les divinités du Hatti, de l’Egypte ou des Cananéens, principalement par manque de connaissance sur ces sujets. Pour la Mésopotamie par contre… La sélection est très bonne, mais mettre l’une des déesses majeures les plus vénérées dans la région non-accessible dans sa ville d’origine ? Creative Assembly, vous avez merdé là. Et pour le coup, cela n’aurait pas changé significativement le gameplay. Oui les Assyriens la vénéraient, comme l’ensemble de la Mésopotamie. Imaginez ne pas pouvoir vénérer Yahweh chez les Cananéens, ou Apollo à Delphes, ou Athena à Athènes : c’est stupide.
Et côté égéen du coup ? Plus dur d’être critique, les mycéniens vénéraient déjà les même dieux que les grecs classiques, leur importance était toutefois différente. C’est notamment le cas de Dionysos, absent des déités et dont l’importance était bien plus grande à l’âge de bronze. Mais les dirigeants étant déjà basés sur ceux cités dans l’Iliade, il me semble acceptable que les dieux du panthéon égéen soient ceux présents dans le même récit.
Refonte importante du gameplay
Avec Dynasties, Creative Assembly ne s’est pas limité à agrandir la carte. Vous vous souvenez des dynasties ? Oui c’est dans le nom et oui elles sont de retour. Vos généraux vieilliront à nouveau, auront des enfants, mourront. Ah et vous pourrez les utiliser comme monnaie d’échange avec des mariages diplomatiques. Bon ça vaut pas grand-chose, mais quand on est en manque de liquidités ça peut toujours servir. C’est peut-être ça le réarmement démographique : avoir de la monnaie pour des ressources utiles.
L’autre refonte importante, et même la principale à mes yeux, est la notion de Charge Administative. Imaginez n’importe quel service public français, maintenant enlevez-leur internet. Bon ça ralentit déjà bien. Enlevez-leur le téléphone. Faut déjà être sacrément motivé là, enlevez-leur les chevaux pour le courrier. On continue ? Vous l’avez compris, plus votre royaume sera grand et développé, plus vous subirez de lourdeurs administratives. En termes de gameplay, cela signifie que sur les plus petits niveaux de charge, vous avez une remise sur l’entretien de vos armées en nourriture et en bronze. Imaginez simplement qu’une personne est suffisante pour faire la compta.
Ensuite ? On arrive à zéro ? Nope, directement des malus, et ils sont du genre à piquer et mettre à mal votre économie rapidement. C’est cruel mais raccord historiquement, car c’est l’administration qui posait souvent problème aux grands royaumes. Maintenir en vie votre économie avec les différentes ressources à gérer prend une toute nouvelle tournure qui réhausse en bien la difficulté d’une partie. Dans le jeu de base, on arrivait finalement assez rapidement à déborder de ressources.
Cela donnera aussi de l’intérêt à jouer « petit », c’est-à-dire contrôler un territoire réduit mais essayer de l’exploiter au maximum et résister aux grands qui chercheraient à vous conquérir. Un objectif qui ferait particulièrement sens avec l’une des cités-états du Proche-Orient.
Passons un peu du côté de la guerre où là encore il y a deux nouveautés dont une plus importante que l’autre à mes yeux. La mineure vient des archers qui peuvent désormais ou tirer en arc, augmentant leur portée mais avec moins de létalité, ou tirer droit, diminuant leur portée mais augmentant leur létalité. Mais qu’est-ce donc que cette létalité dont tu nous parles ? La deuxième nouveauté ! Chaque unité possède désormais une note de létalité qui se traduit très simplement par sa capacité à tuer son adversaire direct. Avoir une armée de gars disciplinés mais qui ne savent pas viser la jugulaire, c’est bien, avoir une plus petit armée de gars disciplinés qui tranchent des jugulaires, c’est mieux. Si l’on devait transposer ça à un FPS, ce serait la capacité de l’unité à faire un headshot, pas de prisonniers donc, mais pas de risques non plus qu’ils reviennent se venger plus tard.
Autres choses à signaler ? La Cour fonctionne comme pour l’Egypte et le Hatti, avec ses rôles et pouvoirs spécifiques. On peut noter que les peuples de Mésopotamie ont accès aux kuddurus, sortes de stèles commémoratives que l’on peut utiliser pour débloquer instantanément n’importe quel décret royal. Les Egéens peuvent faire des offrandes aux dieux pour obtenir des bonus supplémentaires. Ah et on ne célèbre plus Horus à la fin de l’année, victoire !
Les héritages ne sont qu’au nombre de deux pour les Egéens, le linéaire A n’étant pas déchiffré et le linéaire B n’offrant guère plus de sources concernant de glorieux dirigeants passés, c’est logique. Pour la Mésopotamie le nombre ne change malheureusement pas et la région doit se contenter d’Hammurabi et Sargon. Avec une histoire aussi riche, cela fait peu et un Naram-Sin, Shulgi ou Ur-Nammu en plus n’auraient pas fait de mal, d’autant plus que ces dirigeants étaient bien différents les uns des autres.
Avec l’extension Dynasties, Total War : Pharaoh ressemble enfin à ce que j’attendais l’an dernier : un jeu sur l’âge de bronze historiquement valable et qui couvre convenablement les régions les mieux connues de la période. Il y a bien quelques concessions faites, certaines acceptables (les dirigeants égéens) d’autres moins (Ishtar non disponible à Uruk). Creative Assembly a en plus réussi à rehausser la difficulté habilement avec le système de charge administrative. Cela pourrait être effrayant pour un débutant, mais la « première » version prend alors un rôle similaire à la version Touch que l’on avait de Football Manager : un peu moins de profondeur pour aborder les mécaniques clefs sereinement. Si le jeu de base était un 8, avec cette extension il devient facilement un 9 : meilleur Total War pour débuter et excellent Total War historique tout court à la fois. Avec Ishtar à Uruk, un ou deux héritages en plus en Mésopotamie, les gisements d’or et de bronze limités comme je l’avais suggéré dans le premier test, et enfin, une gestion des stocks de nourriture similaire à Three Kingdoms, le 10 aurait été là. Pour la prochaine grosse mise à jour ?
Verdict
Points forts
- La carte qui couvre enfin correctement l’âge de bronze
- Le choix des divinités satisfaisant
- Le système de charge administrative
- Un jeu vraiment complet
Points faibles
- Ishtar absente d’Uruk ?!
- La Mésopotamie méritait d'être encore plus détaillée
- Un système de stock de nourriture à la Three Kingdoms avec plus de ressources limitées (or et bronze) aurait vraiment rendu justice à la période
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