Test : Humankind : Together We Rule (PC, Mac)
Après plusieurs mises à jour d’équilibrage et deux packs de culture, Humankind se dote, un peu plus d’un an après sa sortie, de sa première extension. Together We Rule enrichit la dimension diplomatique du jeu, en proposant une nouvelle devise, de nouveaux mécanismes, et de nouvelles cultures. Mais cela change-t-il vraiment notre façon de jouer ?
Mais vous allez vous aimer les uns les autres bordel de…
Les amateurs de 4X le savent bien : quelle que soit l’orientation de votre civilisation, et la façon dont vous visez la victoire, il est indispensable d’avoir une armée solide pour éviter de se faire rouler dessus par des adversaires plus vindicatifs que vous. Même les plus pacifistes ne peuvent pas échapper à la construction à minima de défenses solides. Par ailleurs, l’aspect diplomatique fait partie des “axes d’amélioration” principaux du titre, selon le terme consacré en entretien annuel pour éviter de dire qu’on a été nul. Ça, et la religion, mais c’est un autre chantier.
Together We Rule a pour objectif de retravailler un peu tout ça, et son outil principal est une nouvelle devise : la pression, ou leverage en VO. Toutes les cultures peuvent désormais en générer, au même titre que de l’influence, de l’industrie, ou de la science, à la condition d’avoir construit un nouveau bâtiment : l’ambassade, qui permet de créer des ambassadeurs et, plus tard, des espions et maîtres-espions. Les premiers peuvent aller où bon leur semble sur la map, y compris en territoire étranger. Ils récupèrent une partie de l’influence générée par les villes visitées, et génèrent du patronage chez les peuples indépendants, ce qui permet d’améliorer notre relation avec eux.
De plus, les bisbilles avec un autre état font apparaître des spots de pression sur la map, que vous pouvez collecter, engranger, avant de vous en servir contre lui. Plusieurs actions s’offrent à vous, de rabaisser le score de guerre de votre adversaire, à appliquer des sanctions économiques. C’est un bon moyen de calmer les ardeurs d’un voisin un peu trop pénible, ou d’écourter une guerre.
L’espion, et le maître-espion, peuvent quant à eux infiltrer les territoires ennemis pour, au choix, créer des armées factices pour détourner l’attention, saboter un district, ou tout simplement espionner une ville afin de vous indiquer la nature des forces en place, par exemple.
Si deux civilisations possèdent une ambassade, il est également possible de signer des traités diplomatiques, pour partager nos recherches scientifiques, ou participer à la construction des merveilles des autres, en échange de ponts de pression, évidemment. Il est également possible de retirer des exigences en cours (par exemple, concernant l’oppression de nos fidèles) en échange de points de pression. On n’est donc plus tout à fait perdant lorsqu’on joue la désescalade.
L’autre ajout important de Together We Rule est le Congrès de Humankind. Un peu équivalent à l’Organisation des Nations Unies, il est fondé à l’ère moderne, réunit toutes les civilisations, et a trois prérogatives.
La première est de voter des lois de façon collégiale. Par exemple, sur la façon de recruter des soldats, soit par conscription, soit en créant une armée professionnelle. La loi mise à l’ordre du jour fait l’objet d’un vote par l’ensemble des civilisations, dont le poids dépend… de la pression dont vous bénéficiez, on y revient. Une fois une loi votée, elle s’impose à tous. Il est possible de choisir de ne pas l’appliquer, au prix de beaucoup de points d’influence, mais cela vous éloignera fatalement de l’idéologie de vos voisins, ce qui peut provoquer des remous dans votre relation.
Le deuxième volet d’activité du Congrès de Humankind est l’orientation des doctrines. En dépensant de l’influence, vous pouvez faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre pour chacun des quatre axes idéologiques du jeu. Une fois un axe choisi, ses effets s’appliquent à tous les empires, mais la balance peut changer selon les lois votées ultérieurement par chaque civilisation.
Enfin, le Congrès peut être invoqué pour résoudre des crises ; typiquement, lorsqu’un empire déclare la guerre à un autre, celui qui est agressé peut demander un vote en espérant qu’il soit en sa faveur, de façon à ce que ses exigences soient satisfaites sans entrer en conflit. C’est peut-être l’action du Congrès la plus concrète, car pour peu que vous ayez beaucoup de leverage, les autres pays se rangeront de votre côté, et vous pourrez non seulement vous en sortir sans combattre, mais également obtenir de coquettes sommes ou même des territoires sans lever le petit doigt. Si le Congrès a voté contre vos intérêts, vous pouvez choisir d’outrepasser son avis… mais à vos risques et périls.
De l'art de la neutralité productive
Pour profiter de ces mécanismes, six nouvelles cultures (une par ère) dotées de l’affinité diplomatique sont incluses. Elles peuvent collecter les points de pression sur la map avec n’importe quelle unité, disposent d’un agent supplémentaire, et disposent de l’action d’affinité “démilitarisation” qui permet de forcer un cessez-le-feu et de déclarer toute unité ennemie présente sur son territoire illégale. Chacune a une affinité secondaire pour ne pas être trop à la ramasse : par exemple les Sumériens sont plutôt fortiches en science, les Hans en construction, et les Suisses… en commerce, évidemment.
Tous ces ajouts s’articulent plutôt bien avec la dernière mise à jour, Metternich, qui accroit les possibilités d’interaction avec les peuples indépendants, qui se limitaient auparavant à “les maraver avant qu’un autre empire le fasse”. En les arrosant d’or ou de swag, on peut désormais négocier des traités, jusqu’à éventuellement les vassaliser ou les intégrer pleinement à notre royaume.
En théorie, il est donc possible de mener une partie totalement pacifiste, et effectivement ça peut être le cas, en tous cas jusqu’à la difficulté “Métropole” : construire de solides défenses peut suffire à avoir la paix pour peu qu’on ait amassé suffisamment de points de pression contre notre opposant. Evidemment, ça ne suffit que dans une optique assez conservatrice : obtenir l’approbation du Congrès lors des guerres de conquêtes est bien plus difficile, à moins d’avoir passé son temps à chercher des noises à tout le monde pour faire popper des points de pression un peu partout sur la carte, et d’avoir une armée d’ambassadeurs pour les récolter. En gros, si vous voulez faire l’équivalent de l’invasion de la Crimée, vous devrez le faire tout seul. C
Le souci, c’est que si vous êtes vraiment pacifiste, que vous vous développez dans votre coin, en étant aligné idéologiquement avec vos voisins, vous n’aurez pas beaucoup d’occasions d’obtenir du leverage, et vous serez dépourvu si un voisin un peu versatile décide de vous attaquer. C’est d’autant plus vrai lors les premières ères, durant lesquelles les interactions avec les autres empires peuvent être peu nombreuses, et il est alors très difficile d’obtenir les étoiles d’ère diplomatiques pour passer à l’ère suivante. Le fonctionnement des nouvelles unités est également un peu nébuleux : il est difficile de comprendre pourquoi un espion n’arrive pas à régénérer sa jauge de furtivité, quel est l’impact de la capacité de détection de nos villes, et les ambassadeurs ont tendance soit à rester plantés sur place, même en déplacement automatique, ou au contraire à aller se perdre en haute mer. C’est un problème dont sont conscients les développeurs, mais pour l’instant il faut malheureusement faire avec.
Je te tiens, tu me tiens…
Un autre problème est lié à l’équilibrage tout relatif des cultures : malgré différents patchs, certaines sont toujours nettement plus intéressantes que d’autres, surtout au début du jeu : on pense au Egyptiens ou aux Harappéens durant l’ère antique, qui permettent de faire croitre rapidement sa production ou sa population, deux éléments clé dans Humankind. C’est toujours le cas avec cette extension, et on a du mal à voir l’intérêt de développer le leverage durant les premières ères, tant on est susceptible de prendre du retard, ne serait-ce qu’au niveau scientifique. C’est moins vrai à partir de l’ère moderne, avec notamment les Suisses et leur trait unique qui produit du leverage sur les unités situées en zone démilitarisées, les Ecossais, dont le trait permet de rattraper un éventuel retard prix en science, et les Singapouriens, qui ont droit à un boost de stabilité à un moment où c’est souvent un problème (mais avec lesquels j’ai eu un bug m’empêchant de construire leur quartier emblématique).
En termes d’équilibrage, l’IA semble plus agressive qu’auparavant, et ce très tôt dans le jeu : j’ai dû abandonner une partie dans laquelle je me faisais bolosser par mes quatre voisins, qui n’avaient rien à fiche de mes redditions. En revanche, l’ambassade produit beaucoup d’influence, ce qui limite l’urgence de créer plusieurs villes en sortie du néolithique.
Enfin, il ne faut pas négliger l’intérêt principal de l’extension : donner un réel intérêt aux relations diplomatiques. Si vous aviez tendance à passer les notifications non urgentes de la part de vos voisins, tant elles avaient peu d’importance - ah ouais, t’es pas content que j’oppresse ton peuple Tu vas faire quoi ? - dorénavant chaque interaction est l’occasion d’obtenir du leverage, ou de signer un accord qui peut accélérer notre développement, et vous aurez envie d’aller systématiquement papoter avec les autres dirigeants. On est aussi obligé d’être plus attentif à notre proximité idéologique, quitte à choisir en partie nos lois en fonction de l'idéologie dominante, et pas d’un besoin à l’instant T. C’est vraiment la réussite de Together We Rule : augmenter les interactions avec les autres Empires.
Sans totalement révolutionner notre façon de jouer, Together We Rule est une extension intéressante qui permet de mettre un peu moins l’accent sur la bagarre et de davantage penser au développement de notre empire. Elle ne révolutionne pas le jeu, et souffre de quelques problèmes d’interface et de comportements de l’IA, mais surtout du souci d’équilibrage global du jeu, qui est moins facile à corriger. En revanche, elle relance l’intérêt du multi, notamment grâce aux espions qui peuvent faire davantage de coups tordus à un joueur humain qu’à une IA, et remet un peu plus au centre du jeu l’aspect diplomatique, à la fois grâce aux nouveau mécanismes et à une meilleure lisibilité des relations entre états. Si vous appréciez déjà le jeu, c’est donc plutôt un bon investissement. Sinon, essayez d’abord la dernière update, pour voir si elle vous réconcilie avec le titre.
Verdict
Points forts
- Développe vraiment l’aspect diplomatique
- Renforce le roleplay quant au choix des lois
- Certaines cultures vraiment intéressantes
- On peut enfin jouer - presque - pacifiste
Points faibles
- Fonctionnement un peu nébuleux malgré les info-bulles
- Comportement erratique des ambassadeurs
- Ne modifie pas l’équilibre des cultures en début de partie
- N'apporte pas des tonnes de nouvelles mécaniques non plus
- Du coup la religion semble encore plus inutile
Infos sur le jeu
Strategie
...
Il faut transmettre cet article (avec peut-être une clé du jeu) à tous les leaders politiques, comme ça ils feront leurs conneries dans leur PC ^^;
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