Test : Cyborg Justice (Mega Drive)

Cyborg Justice est un titre développé par Novotrade exclusivement pour la Mega Drive (euro et USA). Je pense que la plupart des joueurs ne connaissent pas cette équipe de développeurs et pourtant leur histoire est vraiment intéressante. Un peu comme l’aventure incroyable de la licence Tetris, Novotrade est en fait une équipe hongroise coincée dans un pays fermé sur lui-même qui tente de s’ouvrir à l’occident. Ils ne sont que deux et se spécialisent principalement dans la conversion des jeux d’arcade sur ordinateur, ou plus tard sur console 8 et 16 bits. Au fil du temps, ils créent leur siège social aux USA et parviendront à émigrer par ce biais dans ce pays avant de devenir Appaloosa. Eh oui, les concepteurs de jeux à succès comme Ecco the Dolphin sur Mega Drive, étaient avant Novotrade, fondé par deux développeurs hongrois en quête de liberté… Ils continueront à développer quelques titres sous le nom Novotrade mais tous leurs principaux projets et les plus ambitieux seront sous Appaloosa.

Ce petit aparté historique réalisé, et il y aurait encore beaucoup à dire sur leur aventure, mais revenons sur l’un de leurs derniers titres signés « Novotrade », en l’occurrence Cyborg Justice, sorti en 1993 et qui pour le coup n'est pas un portage d’un titre arcade mais un beat’em all totalement original.

Tout commence par la mort du Héros

Une fois n’est pas coutume, l’histoire débute par une catastrophe. Votre vaisseau spatial percute une pluie de météorites dans l’espace et vient s’écraser sur une planète inconnue. Votre héros ne survit pas au crash mais un super ordinateur local tente de vous sauver, sans succès. Ne pouvant guérir votre corps, il incorpore votre cerveau encore intact dans un cyborg, la planète n’étant visiblement composée que de robots. Dans l’opération, il tente de supprimer vos souvenirs afin de faire de vous un cyborg asservi mais il n’y parvient pas. Pour une raison inconnue, vous gardez votre indépendance et cela met en rage votre concepteur. Le super ordinateur envoie alors son armée de robots pour vous détruire avant qu’il vous vienne l’envie de profiter de votre nouvelle vie libre.

C’est là que commence le scénario, vous dans un nouveau corps cybernétique, face à une horde de robots qui ne supportent pas de voir un congénère autonome.

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L’introduction se fait par une petite séquence animée sympathique mais je regrette que le scénario s’arrête là, avec une absence totale de séquences entre les niveaux ou de textes. Lorsque vous finissez le jeu, les robots de cette planète vous reconnaissent comme nouveau souverain immédiatement, ce qui m’a fait sourire, à croire qu’il y avait un message subliminal derrière tout ça de la part des développeurs qui ne seront jamais vraiment libres, un tyran en remplaçant un autre …

Un petit mot sur la jaquette du jeu. Pas exceptionnelle mais pas totalement moche non plus. On sent l’inspiration occidentale pour les méchas, très loin du design japonais que l’on peut rencontrer pour ce type de jeu. Les jaquettes américaine et européenne sont les mêmes.

Un concept de customisation original

Un petit tour dans le menu options vous permet de configurer la difficulté du jeu, le nombre de vies et le sound test. Vous avez également accès au mode « arcade » ou au mode « duel » qui est en fait un versus mode à deux joueurs.

Une fois votre choix établi, le jeu vous oblige à passer par une phase de customisation de votre personnage. Vous devez configurer trois parties de votre robot : les bras, le buste et les jambes, parmi 6 modèles différents pour chaque partie, pour un total de 216 combinaisons possibles.

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Ce choix est stratégique et impacte directement le gameplay du jeu et les possibilités de votre robot. Vous pouvez par exemple privilégier des bras puissants qui frappent fort mais à courte distance, ou plutôt prendre un bras lance flamme, ou encore un poing éjectable ou un tir laser, tout en le cumulant avec un buste bardé de pointes pour infliger des dégâts à vos ennemis lorsqu’ils vous touchent. A cela vous ajoutez des jambes qui peuvent faire un double saut, ou qui seront suffisamment puissantes pour détruire les quelques pièges du décor, ou encore se transformeront en chenilles de tank pour aller plus vite.

Vous l’aurez compris, les combinaisons sont multiples, vous permettant de choisir une approche au corps à corps brute, ou des attaques à distance, ou tout simplement un personnage équilibré. A vous de voir.

Ce système en plus d’être assez original, a au moins le mérite de vous proposer des parties à chaque fois différentes, même si au final comme nous allons le voir, vous n’allez pas vous servir du dixième de vos possibilités.

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Avec toutes ces combinaisons possibles, il faut assimiler également les combinaisons de touches disponibles. Par exemple si vous appuyez sur une direction en plus du bouton A (poing), le coup sera différent selon la direction enclenchée, et même la distance qui vous sépare de votre adversaire. Par exemple, si vous faites bas et A au corps à corps vous allez attraper le bras de votre ennemi et si vous maintenez la pression vous allez pouvoir l’arracher. Cette même combinaison faite à distance ne donnera pas le même coup si vous avez un bras lance flamme, un bras laser, ou un bras scie circulaire par exemple. Idem pour les coups sautés ou les coups de pieds.

Au final, vu la difficulté toute relative du jeu (pour ne pas dire quasi inexistante) et surtout une hitbox complètement loupée (mais j’y reviendrai), on finit par ne se servir que des coups de base et on ne cherche pas à explorer toutes les possibilités offertes par le gameplay, du moins, le jeu ne m’a pas donné envie de le faire personnellement…

Cela reste le point fort du titre, et l’un des seuls, il méritait donc un paragraphe dédié.

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Un beat’em all qui n’en est pas un

Cyber Justice est vendu comme un beat’em all et en applique la plupart des éléments de base, toutefois il se démarque du genre et pas pour le meilleur.

Quand on pense beat’em all, on pense tout de suite à Final Fight, Streets of Rage, Double Dragon. Des jeux dans lesquels vous incarnez un personnage, où vous arpentez des rues malfamées sur plusieurs niveaux, affrontez une ribambelle d’ennemis variés ainsi qu’un boss à la fin du niveau. On y trouve aussi très souvent des armes à ramasser, des objets à détruire dans le décor, des pièges à éviter, voire des embranchements ou des salles, ou bien même des bonus stages pour certains.

Si on ne peut pas dire que les méchas soient le type de personnage les plus représenté dans les beat’em all, ni même qu’ils aient eu beaucoup de succès en la matière, il existe des exceptions. Le parfait exemple reste Robo Army sur Neo Geo sorti en 1991, soit deux ans plus tôt et qui reste à ma connaissance le meilleur beat’em all où l’on incarne des robots (NdShenron : *tousse*Ninja Baseball Batman *tousse*).

Cyborg Justice, lui, vous fait bien arpenter des « rues » sur un scrolling horizontal avec un espace de jeu vertical vous permettant d’éviter les assauts ennemis ou passer derrière votre adversaire pour le frapper. Il propose aussi des boss en fin de niveau et même quelques très rares pièges dans le décor, mais la comparaison s’arrête là. Tout le reste est fait à minima. Je m’explique…

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Ici, vous n’allez jamais affronter plus de deux ennemis en même temps. Quelque soit le niveau traversé, le niveau de difficulté ou le nombre de joueurs, vous n’aurez qu’un seul adversaire à battre en avançant, ou deux au maximum.

Les 5 niveaux du jeu sont découpés en 3 stages, chacun se finissant par un boss. Aucun bonus stage, aucune verticalité dans les niveaux, vous irez tout droit. Aucun obstacle sur votre trajet, aucun objet à détruire, aucune arme à ramasser, à part un trou ou un petit tourbillon à éviter très rarement (4 ou 5 fois maximum dans tout le jeu). Le jeu est vide, avec un level design au ras des pâquerettes. Même les premiers beat’em all comme Double Dragon proposaient cent fois mieux, et vous n’avez pas lu le pire.

En plus de ne proposer que deux ennemis à battre maximum en même temps, ces derniers seront toujours les mêmes tout au long du jeu. En tout on doit avoir 4 modèles différents de méchas proposés alors que le jeu offre quand même 216 combinaisons possibles !!! Le clou du spectacle étant les boss qui sont TOUS les mêmes à chaque niveau. Oui, vous avez bien lu. Le boss du niveau 1 sera le même que celui du niveau 2 et ainsi de suite, celui-ci n’étant qu’un robot lambda sans réelle différence avec ceux que vous avez déjà affronté. Seul le dernier boss a son identité propre. Je n’avais jamais vu ça.

Pourquoi n’ont-ils pas exploité le principal intérêt du jeu à savoir proposer des robots construits aléatoirement parmi toutes les combinaisons possibles et faire des boss uniques à chaque niveau ? Aucune idée.

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Autre information intéressante pour laquelle je n’ai pas trouvé d’explication. A chaque fin de niveau votre score est découpé en catégories : Fairplay, Brutality et Technique.

Euh, mais Fairplay dans un beat’em all, c’est quoi exactement ? Comment on fait pour avoir ces points de score ? On attend d’être frappé le premier avant de se défendre, un peu comme Jésus qui tend la joue ? Là on joue des méchas qui se fightent dans un décor futuriste à coups de lance flamme, scie circulaire ou autres armes mortelles, et on a un score « fairplay ». Pas compris…

Un jeu qui sent le concept pas fini

On ne va pas se mentir, Cyborg Justice sent le produit pas fini qu’ils ont dû sortir en vitesse tant il manque de tout, et que les éléments sont multipliés à loisir pour tromper le joueur.

Souvenons nous tout de même que ce jeu sort en 1993, année de sortie de Gunstar Heroes, Rolling Thunder 3, Rocket Knight Adventure, Golden Axe III, et bien entendu bien après des Streets of Rage ou autres beat’em all de légende sur Mega Drive. Techniquement la console était parfaitement maîtrisée et les titres d’anthologie ne manquent pas.

Cyborg Justice n’offre qu’un élément positif, donc nous allons commencer par celui-là : son animation. Oui la décomposition des mouvements de votre robot est fluide et plutôt propre, surtout qu’il a fallu bosser sur les différentes combinaisons de corps jouables. Ça fait un paquet de possibilités et franchement le jeu s’en tire avec les honneurs.

Tout le reste est loupé…

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D’abord graphiquement. Les décors proches ou éloignés sont vides, aucune animation, aucun scrolling parallaxe, aucun relief et une palette de couleurs mal choisie et surtout très peu diversifiée. Pour vous dire la paresse des développeurs, un niveau est découpé en 3 stages comme vous le savez. Eh bien tous les stages sont exactement les mêmes, sauf qu’ils ont changé la couleur dominante. Le stage 1 sera par exemple rouge, le stage 2 vert, et le 3 violet, et ça pour chaque niveau. On se croirait revenir à l’époque des jeux Atari 2600 et autres moniteurs qui n’avaient d’autres choix de changer la couleur des lieux pour vous donner un semblant de nouveauté à chaque niveau.

Ne cherchez pas non plus l’originalité dans les niveaux traversés. Le 1er est sur la surface de la planète, le second ce qui semble être une base, le troisième une base aussi, le quatrième une ville (du moins je crois), et le dernier une grotte. Comme vous allez pouvoir le découvrir sur les photos du jeu, il est même difficile de les discerner et de comprendre où se situe l’action tant ils sont dépouillés.

Enfin les musiques sont insipides et bien entendu ce sont exactement les mêmes pour chaque boss (en plus d’avoir les mêmes boss à affronter).

Il ne restait plus que la hitbox très approximative pour finir de creuser un peu plus la tombe de ce jeu qui ne réussira jamais à vous donner envie d’en voir la fin.

Cyborg Justice partait pourtant avec de bonnes idées. Offrir un beat’em all avec des méchas ce n’est pas si courant, et profiter de l’occasion pour proposer plus de 200 combinaisons possibles de personnages jouables, il y avait de quoi être enthousiaste. Malheureusement le jeu semble avoir été terminé à la va vite avec une technique indigne de l’époque à laquelle il est sorti.

Ne proposant que les mêmes ennemis à battre à l’infini et seulement deux par deux, le même boss complètement nul en boucle, les mêmes stages mais avec une couleur différente, l’absence totale de level design, une bande son oubliable et une hitbox ratée, on se demande comment cette même équipe a pu nous pondre Ecco The Dolphin l’année précédente.

A oublier, sauf pour les collectionneurs.

Verdict

2

Points forts

  • Un jeu méconnu des créateurs de Ecco
  • Des robots customisables
  • Animation des robots bien décomposée
  • Mode deux joueurs

Points faibles

  • Deux ennemis max en même temps
  • Aucun level design
  • Les mêmes décors vides à chaque stage mais de couleurs différentes
  • Une hitbox perfectible
  • Bande son pas très inspiré
  • Les mêmes boss et les mêmes ennemis tout au long du jeu
  • Aucun fun
Avis des joueurs :
Note moyenne Nb avis
Mega Drive 2.2 6

Commentaires

Jamais joué à ce jeu. La jaquette envoie pas mal je trouve, j'imagine qu'il a du faire des déçus :/

Infos sur le jeu


Cyborg Justice
Beat'em up