Test : Dungeons & Dragons: Warriors of the Eternal Sun (Mega Drive)
Les amateurs de jeux de rôle traditionnels (ou encore “sur table”) connaissent bien la licence Dungeons & Dragons. A l'aide d'un maître du jeu responsable de la narration, une équipe de joueurs (qui ont au préalable créé leur personnage) partent à l'aventure, en suivant un scénario original. Guerriers, elfes et nains affrontent toutes sortes de créatures surprenantes dans un univers heroic-fantasy. Les jets de dés sont légion, et les retournements de situation imprévisibles. Les souvenirs qui en découlent sont précieux, presque autant qu'un certain anneau. Westwood Studios se sont attelés à l'exercice de convertir cette expérience sur Mega Drive, voyons sans attendre s'ils ont réussi...
D&D : Dungeons & Dragons
Des donjons. Des dragons. On trouve ces éléments dans le jeu, l'intitulé ne ment pas. En l'occurrence, on notera l'absence du mot Advanced, pourtant très souvent associé à D&D. Et pour cause, Warriors of the Eternal Sun (WotES) utilise les règles de D&D premier du nom, avant la révision Advanced. En cela, la proposition est tout à fait intéressante et singulière, car l'immense majorité du temps ce sont les règles Advanced qui ont été adaptées en jeu vidéo.
Une des principales différences se situe au niveau des personnages jouables. Dans les règles basiques, il n'y a pas de distinction entre le choix de la race et de la classe. WotES propose de jouer un guerrier, un clerc, un mage, un voleur (tous les quatre des humains). On peut également jouer un elfe, un nain ou enfin un halfelin (sorte de hobbit). Il sera essentiel de constituer une équipe variée pour augmenter les chances de succès. C'est d'ailleurs l'un des nombreux attraits des RPG occidentaux, par rapport aux jeux japonais. Ici tout est question de possibilités et de choix, et l'histoire est réellement construite par le joueur et son imagination, plus que par un récit figé et une progression cadrée.
Il ne faut pas bâcler les lancés de dés initiaux ! Il est impératif d'avoir de bons scores en Force, Dextérité et Constitution. Le premier détermine les dégâts infligés, le second la classe d'armure (à savoir les dégâts subis, plus elle est faible, mieux c'est) et le troisième les points de vie. En ce qui me concerne, j'ai opté pour une guerrière nommée Xena, qui a guidé tant bien que mal un groupe de trois mecs vers la victoire : un elfe, un voleur et un mage. L'elfe aura tout de même eu son moment de gloire, je tiens à le préciser.
Zut, j'ai oublié ma crème solaire à la maison
Comme son nom l'indique, WotES nous raconte l'histoire d'un monde où le soleil ne se couche jamais. Dans des circonstances tout à fait surprenantes suite à une bataille contre des gobelins, le château du Duc Hector Barrik s'est retrouvé happé dans un vortex, avant de réapparaître dans une vallée aux falaises infranchissables. Le groupe d'aventuriers que nous avons constitué a pour mission d'explorer ce monde étrange, et de trouver des alliés.
Le joueur est libre d'explorer le château, et de découvrir ses multiples secrets. Un monde de possibilités se dévoile alors, mais encore faut-il réussir à s'extirper de cet état d'esprit que les jeux japonais ont doucement, mais sûrement, installé en nous. Car D&D est un jeu occidental, et il ne fait rien comme les classiques du genre que nous connaissons tous.
Par exemple, il est très fréquent que l'entrée d'un donjon (c'est ainsi que je désigne les sections en 3D) soit simplement posée là, dans un coin, sans indice visuel. Alors ce n'est jamais un passage obligatoire, les entrées indispensables étant toujours visibles, mais c'est passer à côté de près de la moitié des donjons que de ne pas fouiller partout. Ainsi, rien que dans l'enceinte du château, il y a cinq ou six petits donjons à trouver. Lorsque l'on rentre à l'intérieur, la vue du dessus cède sa place à une vue subjective fort bien réalisée. Bien souvent, une description détaille les lieux, comme le ferait le maître du jeu dans un véritable scénario. On se trouve alors à parcourir des couloirs et des pièces, et là encore, il ne faudra pas hésiter à essayer d'avancer dans les murs, des fois qu'un passage secret s'y trouve. Les personnages plus observateurs pourront souvent trouver ces passages secrets ou des pièges, auquel cas un petit message sera affiché dans la fenêtre.
L'exploration du château permet d'obtenir bon nombre d'objets intéressants pour démarrer l'aventure, dont une baguette surpuissante qui lance des éclairs, mais disparaît après usage. Un passage auprès du marchand permettra de récupérer des frondes, et je vous conseille d'équiper chaque personnage d'une arme à distance. Une fois paré, il est possible de quitter le château pour explorer le vaste monde.
Y a pas de dragon ? On n'a pas le niveau !
Vagabonder sans véritable but, et survivre, constitue un premier objectif clef dans WotES. Cela permet de bien comprendre les mécaniques de jeu, qui sont riches et fort bien implémentées. Tandis que l'on explore le monde avec la vue de dessus, les combats sont au tour par tour, et on voit les ennemis arriver. Ce n'était pas quelque chose de courant à l'époque. Comme dans un vrai de jeu de rôle, le décor doit être exploité. Se cacher derrière des buissons pour ne pas s'exposer est une très bonne idée. De même, des personnages peuvent en bloquer d'autres, il faudra donc être vigilant quant au placement. Ne pas exposer les personnages faibles est indispensable, et il faudra bien mettre le mage en quatrième position systématiquement (il sera entouré par les trois autres). Je ne donne pas cher d'une équipe intégralement constituée de mages !
Pour chacun des personnages, on assigne une action sur le bouton A et une autre sur le bouton B. Cela peut être une arme de contact, de distance ou encore des sorts. Ces derniers sont à usage unique, et nécessitent de camper pour être rechargés (conformément aux règles de D&D). Les sorts ont parfois des effets de zone, et comme le veut la logique, ils peuvent toucher les alliés. Il ne sera pas rare de tomber sur des ennemis très forts et/ou très nombreux, car dans le fond, ce n'est pas parce qu'on sort tout juste du château du début du jeu que les ennemis doivent tous être faibles. Là encore, il est agréable de trouver ce genre d'éléments crédibles qui bousculent un peu les habitudes.
La sauvegarde est possible à tout moment en extérieur, et il faudra en abuser. Chaque victoire mérite son campement et sa sauvegarde d'après moi ! Le début du jeu nous amène à explorer la région autour du château, et un campement d'hommes-bêtes au nord. Il y a également un donjon caché dans la cascade, et attention, certains ennemis sont plutôt coriaces à l'intérieur... Dans les donjons, le gameplay en tour par tour est remplacé par un gameplay action, et il devient essentiel de savoir attendre les ennemis pour attaquer par le côté, ou encore de tourner si nécessaire pour limiter les attaques subies. Les frondes seront bien utiles pour attaquer à distance. Les donjons ne permettent pas la sauvegarde, et constituent clairement la partie la plus difficile du jeu. Avoir une approche progressive dans leur exploration sera indispensable, inutile de vouloir tout faire d'un coup.
Il ne sera pas rare de trouver un lieu dans lequel on ne peut pas progresser immédiatement. Les réponses viennent avec le temps, et j'ai adoré cet aspect très ouvert, qui incite à prendre des notes, et à revenir plus tard. Il y a également certains aspects d'un jeu de rôle traditionnel qui sont superbement retranscrits. Le simple fait de ressortir d'un donjon par exemple : le chemin retour est tout autant une aventure que l'aller ! J'avais perdu mes trois boulets, et seule Xena avait survécu. Seulement mon groupe avait été banni du château, et je n'avais plus accès au prêtre pour les ressusciter. Le seul endroit permettant de les ramener à la vie était donc une mare, perdue au fin fond des marécages d'un précédent donjon, et j'ai dû refaire tout le chemin avec Xena seule jusqu'à atteindre cet endroit.
Tout ceci n'était pas écrit dans le scénario par les concepteurs, mais il n'en demeure pas moins que c'était une aventure à part entière, et il est évident qu'ils avaient pensé à cela. Le plus amusant, c'est que plus tard, j'ai perdu tous mes compagnons sauf l'elfe, et pensant ressusciter tout le monde à mon retour au château (je n'étais a priori plus banni), je me suis rendu compte qu'il n'y avait plus personne sur place... Tout cela pour dire qu'un scénario traditionnel peut tout à fait voir ce genre de situation se réaliser. L'histoire en elle-même est d'ailleurs pas mal du tout, et j'ai trouvé la révélation proche de la fin du jeu plutôt surprenante et originale !
Un studio américain qui sait faire des bons jeux ! :shocked:
Pour un jeu de 1992, WotES est fort bien réalisé. Les visuels sont propres et lisibles, aussi bien en vue de dessus que dans les donjons. Ces derniers ont un défilement vraiment fluide, et les ennemis sont tous animés. La bande-son n'est pas reste : elle est fantastique. On la doit aux mêmes compositeurs que pour Dune II sur Mega Drive. Les sonorités sont bien choisies, et l'ambiance très immersive. Pour moi c'est un sans faute, les développeurs s'étaient fixé des objectifs réalistes et les ont parfaitement atteints. WotES reste un RPG après, donc il affiche peu de choses, et ne pousse pas spécialement la console, mais qu'importe. Chaque jeu n'a pas besoin d'être une démo technique.
Malheureusement Westwood Studios ont connu le triste sort de nombreux studios américains. Ils se sont fait racheter par Electronic Arts, qui les ont ensuite fermés, un grand classique pour cet éditeur exécrable. Quel gâchis ! Chez SEGA, Westwood Studios ont été responsables de jeux cultes, comme Dune II et Le Roi Lion sur Mega Drive, ou encore Command & Conquer sur Saturn. Ils ont largement contribué à créer le genre Real-Time Strategy sur PC, mais ça ne devait pas vendre suffisamment pour EA... Avant ces titres, ils avaient signé (entre autres) deux jeux D&D : Warriors of the Eternal Sun sur Mega Drive et Eye of the Beholder sur Mega-CD. La question de savoir s'il existe un développeur américain compétent est donc à nouveau ouverte :sarcasme:
Dungeons & Dragons : Warriors of the Eternal Sun est une belle transposition du jeu de rôle sur console. Les ingrédients savoureux de la formule traditionnelle répondent à l'appel, et dénotent fortement avec ce que l'on a l'habitude de consommer en provenance du Japon. La réalisation est impeccable et la bande-son excellente. Les mécaniques sont riches et bien implémentées, et j'ai pris énormément de plaisir tout au long de cette aventure, qui met l'accent sur la qualité plutôt que la quantité. Si la difficulté à l'ancienne peut rebuter quelque peu, la véritable épreuve, c'est de sortir de ce moule dans lequel nous nous sommes un peu coincés, afin d'accepter la proposition de ce très bon titre occidental dans les meilleures conditions possibles.
Verdict
Points forts
- Belle transposition du jeu de rôle papier
- Réalisation propre
- Excellente bande-son
- Mécaniques très bien implémentées
- Très immersif
Points faibles
- Premières heures un peu rudes
- Difficulté old school
Commentaires
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Je n'ai pas précisé la durée de vie, mais le jeu n'était pas trop long. Juste comme il faut. Je dirai une vingtaine d'heures. Vraiment un plaisir en tout cas.
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J'avais adoré à l'époque, on l'avait fait avec mon cousin. Par contre je l'avais trouvé pas terrible graphiquement à cette époque ^^.
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Y'a quelques années j'aurais adoré mais le temps manque.
Et le jdr me manque aussi.
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