Test : Fist of the North Star : Lost Paradise (Playstation 4)

Depuis quelques années, la série des Yakuza est devenue le fer de lance de SEGA : bien plus régulière que Sonic, que ce soit au niveau du rythme des sorties ou de la qualité des titres, elle fait office de bulle de confort annuel pour les amateurs de la franchise. Évidemment à cette cadence une certaine lassitude peut s'installer, et l'annonce d'un spin-off dans l'univers de Hokuto no Ken (Ken le Survivant chez nous) promettait d'apporter un peu de fraicheur. Malheureusement, le jeu est loin de tenir toutes ses promesses.

Un jeu post-apocalyptique

Le scénario du jeu le situe au début de la première saison de la série, et commence avec la revanche de Kenshiro sur Shin, qui avait kidnappé Yuria et infligé ses sept cicatrices à notre héros. Cependant, il y a un twist : si dans la série, Yuria est supposée morte, ici elle a juste disparu, et après avoir défait Shin, Ken part à sa recherche en parcourant le Wasteland. Il finit par arriver à Eden, une citée fortifiée offrant eau, nourriture, énergie et loisirs à gogo, et il y poursuit ses recherches.

Le système de jeu est quasiment en tous points identique à celui de Yakuza, puisqu'entre deux quêtes faisant avancer la trame principale, on peut se promener dans la ville, rendre service à ses habitants via une série de substories, et profiter de ses restaurants, boutiques et autres lieux de divertissement. Après un évènement perturbateur, Eden sera même peuplée de barbares qui nous chercheront des noises, et à qui on devra remettre les idées en place - de préférence en les faisant exploser de l'intérieur.

Le gameplay des combats est similaire à celui des Yakuza : on peut conclure un combo par une action spéciale qui laisse les ennemis paralysés. On peut ensuite, avec le bon timing, les achever instantanément, ou bien décider de s'en prendre à leurs points vitaux. Cela déclenche une animation ponctuée de 1 à 3 QTE, dont la réussite influe sur la puissance de l'attaque. Cela dit, QTE ou pas, ces attaques laissent quoi qu'il arrive les ennemis en morceaux, voire en marmelade. Le type d'attaque dépend quasiment exclusivement du moment du combo à partir duquel on la déclenche : il n'y qu'une seule attaque qui dépend de l'environnement, et Ken n'utilise jamais d'arme. Même si on en apprend quelques unes au fil de l'aventure, elles sont donc extrêmement répétitives.

Pour en terminer avec le système de combat, une fois la jauge de la Grande Ourse remplie (en donnant ou en recevant des coups), Ken peut passer en mode Burst : il explose sa chemise, frappe plus fort, et gagne des attaques aériennes, individuelles ou de zone, qui sont très pratiques lors des combats contre un grand nombre d'ennemis.

Ken débute son aventure avec une barre de vie et une force de frappe modérées, mais l'expérience gagnée permet de gagner des orbes pour débloquer des compétences dans un quatre arbres différents : Mind, Body, Skill, et Talismans. Certains orbes peuvent être utilisés dans plusieurs arbres, d'autres leurs sont spécifiques, et on peut se retrouver coincé dans sa progression si on a mal géré son truc. C'est un système inutilement abscons, même si au final se tromper n'a pas vraiment de conséquences, car les compétences les plus utiles sont bien réparties.


Quand t'es dans le désert, depuis trop longtemps...

En ville, Ken a le choix entre plusieurs activités, mais on est loin de la débauche de loisirs des Yakuza : on trouve une salle d'arcade pleine de reliques (si on les a trouvées dans le désert), un cabaret d'hôtesses à gérer (avec un mini-jeu qui est une resucée de celui de Yakuza 0, en beaucoup moins intéressant), un casino tout ce qu'il y a de plus classique, une clinique qui propose un jeu de rythme, une sorte de baseball... et c'est tout. Il y a bien une espèce de mini-jeu de barman, mais il n'a strictement aucun intérêt en dehors d'augmenter la liste des items disponibles dans les magasins. Les boutiques et restaurants sont également rares : deux bars, un restaurant, 3-4 échoppes, et c'est tout. Les combats du colisée permettent de passer le temps, tout comme les primes proposées pour arrêter certains criminels, mais c'est tout.

La vraie nouveauté de Fist of the North Star est la possibilité d'explorer le Wasteland en buggy, pour... hé bien pour pas grand chose en fait. Parfois l'histoire, ou une substory, nous envoie ici où là, mais on ne fait que des allers-retours qui n'ont pas vraiment d'autre utilité que de rallonger la durée de vie du jeu. Pire, tout est fait pour nous ralentir : il faut surveiller la jauge d'essence, on dispose d'une jauge de boost limitée, et à chaque fois qu'on quitte un check-point de fast travel/pompe à essence, on doit se taper une animation de Ken montant dans le buggy... alors qu'elle est absente quand on descend en plein désert. On peut la passer, mais cela reste une perte de temps difficilement compréhensible. Globalement, on passe plus de temps dans le désert à chercher des pièces pour son buggy pour... pouvoir passer plus de temps dans le désert, qu'à y faire des choses intéressantes. Heureusement que de temps en temps des hordes d'ennemis nous attaquent : c'est l'occasion de prendre de l'XP, et de tromper l'ennui. Et ne comptez pas sur les courses pour vous amuser : les spots sont introuvables, et elles ne rapportent rien... à part des points pour acheter du matos pour personnaliser son buggy, ou acheter des talismans qui apportent des bonus plus que dispensables. Super.

Au delà des passages en voiture, FotNS souffre d'un gros problème de rythme. Le début du jeu nous impose des dialogues à rallonge, et nous tient par la main dès qu'on veut reprend la manette. Certes, c'est un peu la marque de fabrique de la série, mais ici la phase d'introduction dure plusieurs heures, et c'est vraiment pénible. Pire : il est possible de se reposer dans notre planque pour passer le temps, et visiter Eden de jour ou de nuit. Très bien. Mais il arrive qu'un personnage nous donne un rendez-vous plus tard dans la journée, pour finalement nous dire, une fois l'heure venue, que c'est ballot mais le type qu'on devait rencontrer ne sera là que cette nuit. On se tape donc deux allers-retours vers notre planque pour rien. Évidemment il en va en même dans le wasteland, qu'on doit parfois traverser pour se rendre compte qu'on n'a pas les bons pneus pour passer un obstacle, et on doit donc retourner à Eden, papoter avec Bart, repartir dans le désert pour trouver les bonnes pièces, revenir voir Bart pour customiser le buggy, et ENFIN on peut faire avancer l'intrigue.


Kenshiro dans la colle

Parlons-en, de l'intrigue : ce qui commençait comme une version parallèle prometteuse de l'histoire du manga, laisse vite la place à un vulgaire défilé des personnages principaux, amis comme ennemis. Pensez à un maître du Hokuto ou du Nanto, et il y a 100% de chances qu'il débarque à Eden la bouche en coeur pour faire la peau à Kenshiro. Ce qui est au départ assez sympathique devient ridicule dès lors qu'on se rend compte que c'est presque le seul ressort dramatique de l'intrigue. On est loin des scénarios des Yakuza, qui certes sont parfois capilotractés, et on un peu trop tendance au "toutéliage", mais au moins chaque chapitre représente un mini-arc narratif prenant et avec des nombreux rebondissements et moments d'émotion. Rien de tout ça ici : non seulement le jeu ne raconte rien, mais l'air imperturbablement constipé de Kenshiro annihile les quelques tentatives de faire passer une émotion, quelle qu'elle soit. Résultat : on n'a qu'une envie, passer le plus vite possible les interminables dialogues sans intérêt qui nous sont imposés. Précision : évidemment les substories sont tout aussi nulles que la quête principale.

En fait, c'est tout l'aspect narratif du jeu qui est à la ramasse. Dans les Yakuza, la dissonance de ton entre l'histoire principale et les substories fonctionne car même quand la situation est tendue, le caractère de bon samaritain de Kiryu permet de croire que oui, il peut arrêter une enquête pour acheter des croquettes pour chien. Et puis quitte à être dans le quartier chaud de Tokyo, pourquoi ne pas s'amuser un peu ? Mais l'univers post-apo de Hokuto no Ken ne se prête pas à ce genre de grand écart. Rejouer à une vieille borne Super Hang-On ? Allez, pourquoi pas. Servir des coktails aux noms en forme de calembours, tout en écoutant les soucis des clients, ou gérer un club d'hôtesses ? Jamais de la vie. On peut comprendre en quoi le côté impassible de Ken dans ce genre de situations est comique, mais dans un univers aussi sombre que celui de HnK, on n'y croit pas un instant. Et la réutilisation telle quelle d'assets de Yakuza 0 (notamment les boxs du club à hôtesses, ou la démarche de Ken, calquée sur celle de Kiryu) trahit la volonté des devs de ne pas trop se prendre la tête et de bêtement copier une formule qui marche.


Tu es déjà mort... d'ennui

Le jeu utilise le moteur de Yakuza 0, sur lequel a été greffé un pack de textures "manga" qui est franchement réussi quand les personnages sont à peu près immobiles, mais montre ses limites dès qu'ils ouvrent la bouche ; le rendu est statique, bien loin de la qualité des animations faciales habituelle de la série, même pendant les cinématiques. Pour le reste, les décors sont assez réussis, tant qu'on n'est pas trop exigeant avec la qualité générale des textures, mais bon, les amateurs de la série Yakuza ne sont pas à cheval sur ce genre de choses. Non, c'est l'animation qui pose problème - heureusement que le chara-design est plus qu'à la hauteur, et que l'animation des combats est franchement jouissive. Côté son, le fan s'amusera à reconnaître les seiyu qui officient habituellement sur les Yakuza. On reconnaît bien sûr Takaya Kuroda, mais d'autres font aussi leur apparition. Le doublage est de qualité, même si Kuroda, qui n'a pas grand chose à jouer, est clairement en retrait.

La vingtaine d'heures nécessaire pour terminer Fist of the North Star n'est pas un calvaire, essentiellement grâce aux bastons : c'est toujours rigolo de voir exploser les ennemis de l'intérieur, même quand c'est pour la 200è fois. Mais le jeu échoue lamentablement là où la série Yakuza brille habituellement : la qualité de son écriture, et la cohérence de son univers. On a donc beaucoup de mal à s'impliquer dans l'aventure, malgré l'apparition d'à peu près tout le casting de la première série animée, et l'absence de récompense pour compléter tous les objectifs ne fait rien pour nous motiver. Cela en fait un titre plus que dispensable, surtout si vous commencez à saturer un peu de ce système de jeu. Avec deux épisodes déjà sortis cette année, plus Yakuza 0 sur PC, vous pouvez zapper celui-ci sans état d'âme, et attendre éventuellement une bonne grosse baisse de prix.

Verdict

5

Points forts

  • Très bon charadesign
  • Les combats sont assez fun
  • Fan service correct

Points faibles

  • Scénario sans intérêt
  • Sorties en buggy inutiles
  • Mini-jeux nuls
  • Gros problème de ton
  • Du recyclage en dépit du bon sens
  • Trop de grind, et inutile en plus
Avis des joueurs :
Note moyenne Nb avis
Playstation 4 6.0 1

Commentaires

Rage, 09 oct 2018 - 2:53
De mon point de vue le jeu fait le job et c'est moins pire que sous la Tecmo Koei : et le pack Euro collector est sympa :good: Merci pour ce test en tout cas.
Ah oui, je pense que c'est le meilleur jeu de la licence Hokuto no Ken (à part peut-être le jeu de baston 2D ?). Mais franchement c'est une adaptation basique et balourde.
pas très folichon visiblement. Je me laisserais peut être tenté d'occasion, j'aime beaucoup l'univers.
J'avais déjà le jeu tecmo et bien que grand fan du hokuto (à beurre), c'était sympa mais sans plus. Je passe mon tour sur celui-ci qui ne respecte même pas la trame originale.
Rage, 10 oct 2018 - 3:25
Justement tant mieux qu'il ne respecte pas la trame !! On la connait déjà mille fois et tout l'intérêt de cette version c'est d'avoir ce mélange Yakuza / Ken qui reste quand même une très bonne idée. Franchement c'est pas un grand jeu comme le dis justement le test mais faut savoir s'amuser avec la chance qu'on a qu'ils aient localiser ce jeu !! Je suis content de mon achat en somme :good::good:
Le jeu est pas mauvais non plus en soit, comparé à la tera tonne de daube qui sort chaque années.

Par contre il ne vaut pas son prix.
Ca aurait du être 30 balles au launch vu le budget de clodo investie dans sa production.
S'éloigner un peu de la trame, OK, mais kenshiro qui joue les barman (ou un truc dans le genre), désolé mais pour moi ça passe pas !
Un barman, c'est tout à fait ça. Et s'éloigner de la trame oui, mais pour en faire rien du tout...