Test : Total War : Warhammer (Windows)

De longues journées à trimballer des valises, à déballer des figurines en plastique, à se moquer du skill peinture de ses adversaires, à installer tout le bazar, à embrasser des dés pour s'attirer les faveurs du hasard et à s'engueuler au sujet des règles : voilà ce que m'évoque Warhammer. Pas que j'étais joueur, non, je me contentais de boire des bières pendant que mes potes alignaient leurs armées à deux SMIC dans le salon ou le sol du garage. Quand on m'a annoncé que j'allais tester Total War Warhammer, j'ai eu un réflexe pavlovien : j'ai décapsulé une Chimay et j'en ai renversé sur la table, en l'honneur de ces soirées trop longues et si lointaines.

L'avantage, c'est que je ne me fais plus engueuler parce que des elfes ou des nains se retrouvent aspergés comme à l'époque. L'inconvénient, c'est que ma copine n'a pas compris la portée de mon geste et m'a pourri ; aucun sens de l'hommage, je vous jure. Mais ce nouveau Total War méritait-il que je gâche de la bière et que je dorme sur le canapé ? Sera-t-il à la hauteur des attentes des fanatiques du marteau de guerre ?

Si Total War est un jeu de grande stratégie parsemé de batailles en temps réel, Warhammer est lui un jeu de batailles en tour par tour qui peuvent être scénarisées ou non. Dans l'un on gère des provinces, on construit des bâtiments et on recrute de la chair à canon, alors que l'autre nous met aux commandes d'une armée dont il faut ordonner les déplacements et résoudre les affrontements à grands coups de jets de dés. Comment faire s'accorder ces deux gameplay ?

Creative Assembly a fait un choix : n'intégrer de Warhammer que le décor et réserver le cœur du jeu à son moteur maison. Mais n'allons pas trop vite en besogne...

Pour Karl Franz Ferdinand Kafka !

Au menu, quatre factions dans le jeu de base : l'Empire, les Nains, les Comtes Vampires et les Peaux-Vertes, auxquelles s'ajoutent le Chaos gratuitement si vous avez préco le jeu ou si vous avez raqué le premier DLC. Chacun a ses objectifs propres, ses affinités avec ses voisins plus ou moins velus et surtout une compatibilité avec les provinces : les Nains peuvent occuper les provinces des Peaux Vertes mais pas celles de l'Empire, qui lui peut conquérir les territoires Vampires mais doit se contenter de raser les cités Naines ou Orks.

Un choix justifié par les différences fondamentales entre les races mais qui aurait pu être contourné en obligeant la faction à raser la ville avant de la reconstruire de zéro avec un éventuel malus plutôt que de devoir laisser des provinces inhabitées.

Destin de ta race

Au rayon des différences, TWW rajoute quelques subtilités bienvenues. L'Empire se joue de façon relativement classique, avec ses troupes humaines, l'ordre à maintenir dans ses provinces et une magie offensive basée sur des buffs de moral et de vitesse.

Les Nains disposent de la possibilité de se déplacer par des souterrains, redoutable pour prendre l'ennemi par surprise, ainsi que d'unités jouant de la hache et du marteau couplées à de nombreuses capacités d'artillerie.

Les Comtes Vampires jouent les nécromanciens et leurs armées sont constituées de puissantes unités associées à des hordes de morts-vivants peu résistants mais qui ne connaissent pas la peur. Ils vont également corrompre à l'avance les territoires qu'ils souhaitent envahir.

Les Peaux-Vertes foncent dans le tas avec leurs orcs, gobelins et autres trolls qui ont besoin de faire la guerre sous peine de les voir subir une forte attrition ; pour eux la paix n'est pas une option.

Enfin le Chaos est une horde "attilienne" qui après avoir soumis les peuples nordiques tentera de raser les provinces occupées pour pouvoir lancer des raids de plus en plus loin dans les terres non corrompues.

Chacune de ces factions propose donc des options distinctes, ce qui est très intéressant en termes de rejouabilité puisque les stratégies à employer devront être radicalement différentes.

La subtile diplomatie d'un Orc

Bref, c'est un peu l'anarchie mais c'est tout à fait dans l'esprit de Warhammer. Chaque faction est entourée de groupes injouables, mais j'entends déjà les DLC arriver au grand galop pour permettre au joueur de jouer les Bretonniens ou une des innombrables armées de la franchise. On commence par rameuter tous les membres de sa race et s'allier avec eux. Simple alliance militaire ou carrément intégrés au sein de sa fédération, l'objectif est de s'assurer le contrôle d'un certain nombre de provinces clés en fonction de sa race.

On peut donc casser gentiment la gueule de ses voisins pour leur faire signer de force un pacte, ou, de façon moins rigolote, leur filer des cadeaux et combattre leurs ennemis pour qu'ils nous aiment d'un amour aveugle et qu'ils renoncent à leur souveraineté avec des cœurs dans les yeux.

Cette phase constitue la mise en place, l'introduction d'une campagne qui se révèlera bien plus compliquée. Elle permet de prendre ses marques, de faire monter l'XP de ses personnages principaux et de goûter aux batailles tactiques.

Total WAAAAAGH

Seulement, avec des unités de bas niveau et des héros sans capacité spéciale, les combats ressemblent furieusement à ceux des autres Total War. C'est bel et bien lorsque l'on débloque des unités plus avancées par la construction de bâtiment qu'on commence à voir la patte Warhammer apparaître. Entre les canons, les unités volantes, les machins difformes du Chaos, voilà de quoi colorer les champs de bataille. De sang, surtout, mais tout de même.

Quant aux personnages légendaires et leurs acolytes, ils interviendront comme des " super unités ", colleront des mandales qui font décoller des vagues d'ennemis en faisant des gros doigts à Sauron, lanceront des sorts tout plein d'effets pyrotechniques, apporteront des bonus aux unités environnantes... enfin presque. Parce qu'au niveau un, ils ne feront pas trop les malins. A pied, sans capacité spéciale ni objet à utiliser, ils seront l'équivalent d'un gros marteau pour taper sur l'ennemi, utiles et efficaces mais tout de même vulnérables.

Dans tes yeux de figurine

Après avoir engrangé de l'expérience, elles deviendront redoutables. On peut leur offrir une monture, voire même un canasson volant pour leur donner une mobilité extrême. Leurs pouvoirs se diversifient et leur efficacité aussi ; un mage de bataille bien utilisé peut faire un carnage dans l'armée adverse.

La gestion de ces héros et acolytes est primordiale, vous ne pouvez en commander qu'un nombre réduit et vous ne pourrez pas tous les faire progresser aussi vite. Les menaces arrivant de tous les côtés, il faudra bien planifier et coordonner leurs déplacements pour pouvoir tenir son territoire.

Avec ses créatures fantastiques, ses nains, ses gobelins, Total War : Warhammer est le premier de la série à me rappeler Heroes of Might and Magic. Ces bâtiments à construire pour recruter telle ou telle unité, ces héros à faire progresser pour accéder aux sorts ou aux compétences intéressantes, ces déplacements en tour par tour... il y a bien les batailles en temps réel pour différencier fondamentalement les gameplay mais cela m'a sauté aux yeux pour la partie gestion par rapport aux TW classiques. Ressenti très personnel sans doute.

Art de la guérilla ou stratégie du choc frontal ?

Le challenge proposé par l'IA est toujours un point crucial dans les Total War. Après de nombreuses déceptions dans les opus précédents, on sentait que Creative Assembly commençait à rectifier le tir notamment avec Attila. En termes de gestion pure et simple, les factions gérées par l'ordinateur s'en sortent honorablement même s'il faudra parfois jouer à Benny Hill avec des armées ennemies que l'on poursuivra jusqu'aux confins de son territoire. Mais j'ai surtout rencontré des difficultés à contenir les événements particuliers comme ces invasions du Chaos qui semblent sortir de nulle part avec des armées massives ; cela oblige à maintenir une constante surveillance de tout son empire et si cela fait un peu "artificiel", cela maintien un challenge constant.

Les débuts de partie sont relativement évidents et on ne rencontrera pas de difficulté particulière avant quelques dizaines de tours ; mais quand les factions ennemies auront amélioré leurs capacités de recrutement et le niveau de leurs troupes, le joueur qui se sera reposé sur les lauriers de ses premières victoires verra ses belles armées se faire écraser sur le champ de bataille s'il n'a pas lui même construit les bâtiments nécessaires. Même pour un habitué de la série il faudra s'accrocher pour survivre et atteindre ses objectifs.

Veni, Vidi, Corrupti

La corruption des provinces est un adversaire insidieux, rampant et qui peut s'avérer très gênant. Que l'on soit dans un camp ou dans l'autre (le Chaos ou les Vampires), le but est de pourrir les provinces de l'intérieur. Les territoires affectés verront leur ordre public se dégrader entre autres malus, et surtout les troupes d'invasion subiront moins d'usure liée à leur nature dans les verts pâturages encore vierges de toute influence contre nature. Il est rapidement indispensable de prévoir des moyens de contrer cette corruption, que ce soit sous la forme de bâtiments, de compétences de héros ou de politique de province si on ne veut pas perdre la bataille avant même qu'elle ait eu lieu.

Au niveau technique, il tourne correctement (entendre : de façon jouable sans frustration) sur ma config pourtant modeste ; une optimisation qui n'était pas la marque de fabrique de Creative Assembly et qui fait plaisir. le design de la carte est réussi mais le jeu ne marque pas non plus une révolution graphique dans la série. C'est beau sans casser trois pattes à un canard du Chaos.

Coup d'un soir ou début d'une histoire ?

Avec ses factions au gameplay différent, sa carte rafraîchissante, l'attention portée aux détails, son état tout à fait acceptable dès la sortie (Creative Assembly semble avoir parfaitement pris la mesure de ses erreurs de Rome 2), on oublie rapidement qu'il ne s'agit que d'une grosse skin posée sur un jeu Total War. Mais un des meilleurs jamais sorti, une franche réussite qui offre un challenge permanent et équilibré. Le studio s'est visiblement fait plaisir et j'en viens à espérer qu'ils continuent à tromper leur domaine historique pour s'aventurer plus souvent dans les univers de fiction.

On verra malheureusement la cohorte de DLC débarquer sous peu pour introduire les autres races pour un prix exorbitant, seul regret d'un titre qui a su répondre aux nombreuses attentes qu'il nourrissait. Fans de Warhammer, habitués à voir la franchise adaptée en jeu vidéo, vous pouvez ranger les Kikoup et démonter les Steam Tanks de l'empire, ce mariage renouvelle de façon bienvenue la série Total War sans insulter l'univers dont il s'inspire et si le prix demandé est élevé par rapport au marché du jeu PC aujourd'hui, il coûte tout de même moins cher qu'une boite de figurines même pas peintes.

Verdict

8

Points forts

  • L'univers qui renouvelle la franchise
  • Les nouveaux éléments de bataille
  • Le gameplay différent selon les factions
  • Un jeu correctement optimisé

Points faibles

  • Prix élevé pour le marché PC
  • Une politique de DLC discutable

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